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La représentation sacramentelle du Christ TêteRevue thomiste, 2013
Un des objectifs principaux que Benoît XVI avait fixé à l'année sacerdotale célébrée en 2009-2010 était de raviver, dans la conscience de toute l'Eglise, et au premier chef dans celle des ministres ordonnés, ce qu'il appelait lui-même « la tension de chaque prêtre vers la perfection spirituelle dont dépend avant tout l'efficacité de leur ministère 1 ». Ce propos était immédiatement pastoral, en particulier moral et spirituel, avant que d'être doctrinal et théologique. Il s'agissait de stimuler l'élan spirituel des prêtres, l'exigence de perfection par la consécration totale de leur vie à leur ministère et donc au Christ maître et modèle de toute vie apostolique. Il n'en est pas moins intéressant de voir comment Benoît XVI fondait théologiquement cet impératif de perfection spirituelle inhérent à la vocation sacerdotale. Il distinguait, non pour les opposer, mais pour qu'on ne les sépare pas, et même pour qu'on les ordonne plus adéquatement l'une à l'autre, deux dimensions du sacerdoce ministériel : d'une part la dimension fonctionnelle, celle du service de la communauté à travers un certain nombre d'actions ; d'autre part la dimension sacramentelle-ontologique, en vertu de laquelle le service fonctionnel de la communauté est ancré, par un don de Dieu, dans l'être et la vie toute entière du ministre. Benoît XVI voulait ainsi rappeler que le ministère sacerdotal ne se réduit pas à « une simple fonction confiée à des collaborateurs », mais qu'il s'appuie, en amont, sur « la configuration sacramentelle du prêtre au Christ tête ». Et c'est précisément cette configuration sacramentelle, véritable consécration, qui « porte en elle, comme une conséquence, l'adhésion cordiale et totale [du prêtre] à ce que la tradition ecclésiale a identifié comme l'apostolica vivendi forma 2 », à savoir le don total de sa vie, dans le Christ, pour l'oeuvre du salut. Autrement dit, c'est parce que le ministère sacerdotal ne se réduit pas à une fonction à travers la réalisation de diverses actions, mais présuppose le don d'une configuration ontologique particulière du ministre au Christ, qu'il emporte, comme conséquence intrinsèque, l'exigence de cette « tension nécessaire » vers la perfection morale et spirituelle : Dans cette lumière, il apparaît clairement que les tria munera sont tout d'abord un don et seulement par la suite une fonction, d'abord une participation à une vie, et donc une potestas 3. L'intention principale de Benoît XVI était donc de manifester comment l'exigence morale et spirituelle qui doit animer la vie et le ministère du prêtre trouve son fondement dans la réalité même du don reçu par le sacrement de l'ordre. C'est ce don reçu, configuration sacramentelle au Christ, qui appelle le prêtre, dans l'exercice même de ses fonctions ministérielles, à un don total de lui-même, à l'image du Christ qui s'est lui-même totalement donné à l'oeuvre du salut des hommes. Parce que configuré sacramentellement au Christ par son ordination, le prêtre doit entrer dans le processus d'une « substantielle perte de soi dans le Christ, en participant à son mystère de mort et de résurrection avec tout son être 4 ». Parce qu'il a reçu le don d'une vie, celle du Christ 1 BENOIT XVI, Discours aux participants à l'assemblée plénière de la Congrégation pour le clergé, 16 mars 2009. 2 Ibid. 3 Ibid. 4 BENOIT XVI, Audience générale du 24 juin 2009.
Y. Tillet