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(PDF) Watching music - Music Video Cultures

Watching music - Music Video Cultures

La tenue d’un colloque international, interdisciplinaire et interinstitutionnel sur les clips musicaux à l’ère numérique a pour but premier de faire l’état des lieux des recherches portant sur un objet touchant par définition à de nombreux champs disciplinaires. Si les études sur le sujet ont été nombreuses dans le monde anglophone (en particulier au sein des popular music studies), les analyses de langue française sont plus rares et confinées. Ces rencontres ont non seulement pour but d’interroger une éventuelle spécificité francophone dans l’analyse et l’interprétation des clips musicaux, et de la confronter à d’autres approches internationales, mais surtout de comprendre, à partir de cet objet situé à la croisée de nombreuses industries (de la musique, cinéma et vidéo, publicité), les mutations plus larges s’opérant dans divers secteurs à l’heure du numérique. Une telle rencontre (organisée en grande partie par des doctorants) serait ensuite une réelle opportunité pour des jeunes chercheurs issus de divers horizons, pays et institutions de confronter leurs approches théoriques et méthodologiques. Il s’agit également de mettre les recherches en perspectives avec les pratiques des professionnels qui auront eux-mêmes la possibilité de participer à ces réflexions. Ce colloque offrira enfin un espace pour des débats critiques et programmatiques sur un objet qui répond à la fois aux logiques des industries et marchés de la culture et à des préoccupations esthétiques, politiques ou sociales. Le clip musical, en tant qu’artefact culturel et marchand d’abord au service de la promotion des productions musicales de vedettes – un dispositif médiatique « second », malgré des tendances à l’autonomisation relative – s’inscrit dans des logiques d’organisation de l’industrie musicale. Il convient donc d’interroger sa place, à la fois sur un plan international et au regard de l’histoire de ses développements, notamment depuis l’explosion commerciale de la forme avec les chaînes dédiées telles que MTV, jusqu’aux sites musicaux et aux pratiques amateures actuels. Ce colloque vise ainsi à comprendre les évolutions de la place du clip dans les stratégies de développement de l’industrie musicale. De même, les changements des structures de production appellent des analyses empruntant aux champs de l’économie politique de la communication, de la socioéconomie comme du droit. S’il s’agit ainsi de dégager des traits généraux de la production audiovisuelle au sein de l’industrie musicale, il faut néanmoins également considérer l’existence de modes de production « alternatifs », œuvrant dans une grande précarité matérielle, et déployant ainsi d’autres pratiques. Cette échelle ouvre à l’analyse du contexte de production et de diffusion lui-même, et donc à l’analyse de ses médiations techniques, organisationnelles et sociales, par des perspectives inspirées tant des analyses interactionnistes (mondes de l’art) que du modèle de la « production de la culture ». Y a-t-il une culture professionnelle typique, peut-on faire l’histoire de ces pratiques professionnelles, prises individuellement ou collectivement comme « monde » ? Cette échelle invite bien sûr à l’analyse esthétique des clips, et ce qu’elle doit aussi bien aux conventions des professionnels de la production qu’à celles du « genre ». Comment se négocient les conventions hybrides et les pratiques professionnelles mêlées entre monde audiovisuel et monde musical ? Quels sont les outils méthodologiques disponibles ou à créer pour appréhender ces œuvres ? Comment envisager les rapports entre musiques et images ? Finalement, comment définir un clip ? Les analyses de terrain seront ici privilégiées, ainsi que celles croisant sociologie de l’art et esthétique. Les ressources de la sémiologie, des études cinématographiques auront ainsi toute leur place dans cet événement. Troisièmement, la question des usages, des pratiques signifiantes des publics doit être considérée, à l’aide des apports de la sociologie de la réception, des cultural studies, ou encore de la sémio-pragmatique. Les analyses prenant en compte la forme audiovisuelle étant encore rares dans le champ français (une des motivations de ce colloque), des propositions de cet ordre seront les bienvenues, à condition qu’elles s’affranchissent d’un cadre d’analyse purement sémantique et discursif. Les clips représentent aujourd’hui un terrain privilégié pour analyser les cultures populaires ; la question des représentations de classe, de genre, de race est centrale. Existe-t-il une « culture du clip » ? Quels sont les publics du clip ? Que nous apprennent-ils sur les processus de construction identitaire contemporains ? Suivant le travail d’Antoine Hennion sur la « passion musicale », on ne peut comprendre la réception en la considérant comme un moment séparé de la production musicale. Comme tout dispositif médiatique, le clip musical suit une chaîne de traductions, de sa conception à ses usages, et inversement, la forme ayant une histoire, et les producteurs et artistes étant à l’écoute des pratiques de réception. Enfin, ces dernières années, la création, production, diffusion et valorisation des biens culturels ont été profondément modifiées. Comme le note Philippe Bouquillion, « grâce aux libéralisations, mais aussi aux innovations technologiques, en particulier la numérisation, les articulations entre industries de la culture et de la communication sous l’égide des industries créatives s’intensifient ». Le vidéoclip, comme produit culturel, est à la croisée de nombreuses industries (musique, cinéma et vidéo, publicité), il est donc à ce titre un objet parfait pour comprendre des mutations plus larges s’opérant dans divers secteurs. Le vidéoclip ne peut-il pas être appréhendé comme un cas révélateur du développement d’une culture entrepreneuriale indépendante ? Et comme un terrain d’études pour montrer le déplacement du caractère incertain de la valorisation des biens culturels vers les producteurs eux-mêmes ? Les sites du Web collaboratif deviennent des endroits clés dans la création, diffusion et promotion des contenus en ligne via une logique de user generated contents valorisés par les plateformes et les publicités sans que les producteurs ne soient eux-mêmes nécessairement rémunérés. Bien qu’il semble que la profusion de vidéoclips en ligne participe de leur valorisation culturelle, la question de leur valorisation économique reste encore aléatoire pour les producteurs.