Papers by Maria Magdalena Székely
Était-ce ou ce n’était pas ? La comète de Halley et la bataille d’Obertyn
L’étude analyse l’appar... more Était-ce ou ce n’était pas ? La comète de Halley et la bataille d’Obertyn
L’étude analyse l’apparition d’une comète (nommée plus tard de Halley) en 1531, dans le contexte du conflit militaire entre la Moldavie et la Pologne. La traversée du ciel par une comète pendant l’été de cette année a été enregistrée par de nombreux témoignages de l’époque, tant en Europe qu’en Asie, mais dans les sources de Valachie et de Moldavie, contemporaines de l’événement, elle n’a laissé aucune trace. Les chroniqueurs polonais placent l’apparition de l’astre à des dates différentes, selon les événements militaires déployés sur le terrain : soit lorsque les troupes polonaises ont traversé le Dniestr (le 1er août), soit lors de la bataille d’Obertyn (le 22 août). D’après Stanisław Gorski, la comète est apparue le 12 août, le phénomène faisant espérer les combattants que l’étoile leur prédise, du ciel, une brillante victoire, car elle ressemblait aux armoiries de leur commandant, l’hetman Jan Tarnowski. Le chroniqueur saxon Hieronymus Ostermayer ajoute le détail que la comète a été visible pendant cinq jours. En tenant compte de tous les témoignages disponibles, l’auteur conclut que le phénomène céleste aurait été visible approximativement entre le 12 et le 16 août ; durant cet intervalle, aucun événement important ne s’était produit au sol. Cependant, les auteurs polonais l’ont transformé en signe de victoire et ont placé le moment de son apparition soit au début du conflit moldo-polonais, soit à sa fin, tel que le narrateur l’a jugé plus approprié ou suggestif. L’association de l’étoile brillante et lumineuse dans le ciel avec l’étoile d’or sur le champ d’azur des armoiries de Jan Tarnowski (le herb Leliwa) est la dernière et la plus convaincante preuve que le phénomène astronomique de l’été 1531 ait été utilisé comme moyen de propagande politique en faveur des Polonais. Voilà pourquoi le chroniqueur moldave Macaire n’a pas ressenti le besoin d’invoquer son apparition dans la description de la campagne terminée d’une manière désastreuse pour son prince, Pierre Rareş.
De nouveau sur les emblèmes de la princesse Marie Assanine Paléologuine. Une approche historiogra... more De nouveau sur les emblèmes de la princesse Marie Assanine Paléologuine. Une approche historiographique (I)
En 2004, l’auteur a cosigné, avec M. Ştefan S. Gorovei, une étude consacrée aux emblèmes impériaux de la princesse Marie Assanine Paléologuine, épouse d’Étienne le Grand, prince de Moldavie (1457–1504). Après presque deux décennies, le sujet est repris, cette fois-ci du point de vue historiographique.
L’étude ci-présente est composée de deux volets. Dans le premier, on passe en revue les titres qui, en 2004, ont été perdus de vue ou qui n’ont pas été retrouvés dans les bibliothèques fréquentées à l’époque. Les textes, résumés dans l’ordre chronologique de leur publication, ne changent en rien la démonstration et les conclusions initiales, mais, par contre, les confirment et les renforcent: le monogramme des Paléologues a été un signe caractéristique pour les membres de cette famille et seulement pour eux, un signe qui soulignait leur appartenance généalogique à la dynastie des derniers empereurs byzantins. L’association du monogramme à l’aigle bicéphale, «les bâtons parallèles», «le losange ouvert» ou le swastika (la croix gammée) fait de chacun d’eux des symboles du pouvoir impérial.
Le deuxième volet est consacré à l’analyse de la nouvelle bibliographie consacrée – directement ou tangentiellement – aux emblèmes des Paléologues. Il s’agit de conférences et d’articles rédigés après 2004 par Paul Canart, Bojan Popović, Robert Ousterhout, Jasmina S. Ćirić, Ştefan S. Gorovei, R. P. Gabriel Herea, Paschalis Androudis, Pagona Papadopoulou et Cécile Morrisson ou le moine Alexie Cojocaru. À quelques exceptions près, les insignes de famille et de pouvoir des Paléologues ont été étudiés seulement dans leurs représentations byzantines et éventuellement dans leurs échos ou répliques du monde sud-slave. Mais, omettre de la discussion les emblèmes brodés sur la couverture de tombeau de la princesse Marie Assanine Paléologuine et ceux qui proviennent de la principauté d’origine de cette princesse, Theodoro (Mangop), appauvrit la sémiotique politique de l’Empire byzantin et empêche une compréhension nuancée de la circulation et du transfert de symboles – porteurs, quel que soit le lieu, des mêmes messages idéologiques. Il faut du temps pour que les résultats d’une recherche soient connus et assimilés dans le circuit scientifique, mais allonger excessivement cet intervalle peut être un signe d’ignorance ou d’arrogance. La méconnaissance des résultats obtenus par d’autres chercheurs dans un domaine d’intérêt commun a attiré la formulation, à plusieurs reprises, d’observations déjà faites et de questions qui avaient trouvé entre-temps leur réponse. Lire et publier en plusieurs endroits le même texte, au fil des années, sans mettre à jour l’appareil critique, est une pratique inacceptable dans le monde académique. Malheureusement, l’autorité scientifique de certains auteurs repose, assez souvent, sur de tels procédés, et sur cette autorité repose leur crédibilité. Ensuite, cette crédibilité devient un gage de compétence. Les emblèmes paléologues du pouvoir souverain – représentés sur
divers supports et dans une large aire géographique – auraient pu devenir l’un de ces objets d’étude qui prouvent la rigueur, la compétence et la bonne foi des spécialistes en la matière. Le bref bilan historiographique dressé ici montre pourtant qu’il n’en est pas du tout ainsi.
«Où était la maison» et «où était la cour»: la signification de certaines formules documentaires ... more «Où était la maison» et «où était la cour»: la signification de certaines formules documentaires (Résumé).
Les documents du premier siècle et demi de l’existence de la principauté moldave contiennent parfois des mentions de maisons ou de cours de certains propriétaires, dans des formules telles que: «où était la maison» et «où était la cour». La présente recherche tente de déchiffrer le sens de ces indications et de découvrir s’ils peuvent contribuer à la reconstitution
de certaines structures de résidence et de propriété d’une époque pour
laquelle les témoignages écrits sont très peu nombreux ou totalement
absents. L’analyse des sources met en lumière quelques observations
intéressantes. Dès le début, il faut préciser qu’il n’y a aucune raison de
considérer les termes maison (sl. domá) et cour (sl. dvorá) comme
synonymes. Les sources écrites et archéologiques prouvent que, pour
nos aïeux des XIVe et XVe siècles, cour signifiait un ensemble bâti sur
une hauteur naturelle (colline, butte, crête), généralement dans un lieu
à forte visibilité, clôturé et composé de la maison du propriétaire – une
structure en maçonnerie –, des dépendances et d’une église-nécropole.
Comme les sources font la distinction entre cour et maison, il faut
supposer que ce dernier terme désignait simplement une habitation,
soit en bois, soit en pierre et briques. La cour comprenait nécessairement une maison, mais une maison ne comprenait en aucun cas une cour. Par conséquent, le terme cour pourrait également être utilisé dans le sens étroit d’habitation – comme il apparaît dans certains cas dans les documents moldaves –, mais le mot maison ne pourrait pas définir l’ensemble du complexe résidentiel, avec tous ses bâtiments, y compris l’église. Les cours étaient situées soit dans des villages individualisés par leur nom, soit dans des villages anonymes, situées au bord de certaines rivières, soit dans une zone connue sous le nom de Champ de Dragoş (Câmpul lui Dragoş). Certains villages où se trouvaient des maisons ou des cours des boyards recevaient les noms de leurs propriétaires. Cartographier toutes les maisons et les cours documentées tout au long du XVe siècle permettrait d’avoir une idée plus concrète de l’emplacement de ces résidences et pourrait fournir des indices sur la valeur économique de ces points, en fonction de leur proximité à des routes et des cours d’eau, c’est-à-dire à des voies de communication de l’époque. C’est d’autant plus important que le rôle militaire des cours des boyards en Moldavie ne semble pas avoir été si significatif qu’on le pensait. Une carte pourrait faciliter la recherche et la localisation, par des moyens modernes d’identification, de sites qui méritent une enquête systématique. Il faudrait ensuite voir, par des recherches généalogiques et prosopographiques, qui étaient les propriétaires des maisons, qui des cours, et si une différence sociale ou économique peut être observée entre eux.
Les chroniques moldaves du XVIIe siècle – Letopiseţul Ţării Moldovei până la Aron vodă (La Chroni... more Les chroniques moldaves du XVIIe siècle – Letopiseţul Ţării Moldovei până la Aron vodă (La Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode), attribué à Grégoire Ureche, ainsi que celle d’après Aron voïvode, œuvre de Miron Costin – contiennent la description des caractères, des défauts et des qualités de certains princes de Moldavie et, exceptionnellement, le portrait d’un prince de Valachie. Pour les personnages caractérisés, les chroniqueurs ont retenu soit exclusivement des traits positifs, soit négatifs, soit les deux. La lecture en parallèle des chroniques et des Enseignements du prince de Valachie Neagoe Basarab à son fils Théodose – la première œuvre parénétique de la littérature roumaine, rédigée un siècle auparavant – prouve qu’entre les portraits princiers des chroniques et les recommandations pour un bon gouvernement de l’œuvre parénétique il y a bien de similitudes. La piété, les qualités militaires, le désir de paix, les aptitudes d’organisateur, la capacité de rendre justice de manière équitable et les vertus personnelles sont des traits communs tant au portrait idéal promu dans les Enseignements qu’aux portraits individuels des chroniques. Les exemples cités par l’auteur de la présente étude il en résulte que les chroniqueurs moldaves aient utilisés un modèle de bon prince (princeps bonus), construit autour de quelques vertus communes pour toute l’Europe chrétienne: pietas, pax, ordo et iustitia. À ces quatre vertus cardinales s’ajoutaient, en fonction de la personnalité du monarque et des circonstances historiques – la force, le courage, la fermeté, la clémence, la miséricorde, la tempérance et la sagesse.
La chronique attribuée à Grégoire Ureche contient six paragraphes avec „enseignements” et „réprimandes”, qui brisent la suite chronologique des évènements. Leur contenu se concentre autour des gestes faits par un roi de Pologne ou par des princes et des boyards moldaves, autrement dit des personnes de la sphère du pouvoir, directement impliquées dans l’acte de gouvernement. Les termes „enseignement” et „réprimande” en roumain ancien couvraient les directions autour desquelles était composé un écrit du type Fürstenspiegel. De même que Les Enseignements de Neagoe Basarab, les fragments de réflexion philosophico-politique de la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode sont des conseils et des avertissements concernant le gouvernement du pays, qui remplissent une fonction formatrice, visant le bon accomplissement de la mission que Dieu avait confiée aux souverains.
Une chronique „depuis la fondation du pays” – comme la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode – était non seulement une collection d’informations portant sur des évènements passés mais surtout une source de légitimité et en même temps un écrit à fonction moralisatrice, destinée à éduquer ceux élus pour gouverner le pays et soutenir sur des fondements historiques leur idéologie politique. L’auteur croit que bénéficiaires des modèles et des anti-modèles de princes qui se trouvent dans la chronique, mais également des paragraphes d’„enseignements” et de „réprimandes” dût être le prince moldave Basile Lupu (dont les efforts de trouver une place dans la succession des anciens souverains et de créer une monarchie héréditaire sont bien connus) et ses successeurs.
De nouveau sur la campagne du prince de Moldavie Bogdan III en Pologne (1509)
L’étude comporte de... more De nouveau sur la campagne du prince de Moldavie Bogdan III en Pologne (1509)
L’étude comporte deux volets, puisqu’il s’agit de deux épisodes de la campagne militaire de Bogdan III (1504–1517) dans le royaume de Pologne en 1509. Le premier, décrit par des chroniqueurs moldaves des XVIIe et XVIIIe siècles, se rapporte à un geste du prince de Moldavie qui, au début du siège de la forteresse de Lwów, jeta sa lance vers la porte de la fortification. Comme l’ont démontré les historiens Ovidiu Cristea et, après lui, Katarzyna Niemczyk, le geste avait une valeur symbolique, étant compris comme une déclaration de guerre, comme un défi au combat ouvert. En faveur de cette interprétation, l’auteur de la présente étude fournit des exemples supplémentaires, tirés des écrits de Diodore de Sicile, Tite-Live, Dio Cassius et Ammien Marcellin, et réitère l’idée que jeter la lance dans le territoire ennemi est, plus que probablement, un topos, emprunté soit directement aux auteurs antiques, soit par l’intermédiaire de penseurs comme Hugo Grotius ou Samuel Rachelius, qui, concentrés sur les fondements juridiques des guerres, ont fait de nombreuses références à l’antiquité classique.
Le deuxième épisode, raconté à la fois par des chroniqueurs moldaves et polonais, a eu lieu dans la ville de Rohatyn, d’où Bogdan III a enlevé la grande cloche de l’église comme butin de guerre pour l’apporter à Suceava où se trouvait le siège métropolitain de sa principauté. Katarzyna Niemczyk estime que le pillage de la ville de Rohatyn, qui appartenait au domaine de la famille de Chodecz, ainsi que l’enlèvement de la cloche auraient été un acte de vengeance du prince de Moldavie contre le noble polonais Stanisław de Chodecz, qu’il considérait coupable de l’échec de son projet de mariage avec la sœur du roi Alexandre de Pologne, quelques années auparavant. Mais, comme l’auteur du texte ci-dessus l’a montré déjà en 2011, avec de nombreux exemples et analogies, la prise d’une cloche en captivité était, dans toute l’Europe médiévale et prémoderne, un geste de pouvoir, propre aux souverains et aux seigneurs. Les sources du temps, tant celles de l’Europe de l’Est que celles de l’Occident, qui mentionnent de tels événements, sont catégoriques à cet égard. En conclusion, l’enlèvement de la cloche de Rohatyn ne peut être interprété uniquement en termes de vengeance personnelle, mais aussi comme une forme de punition, d’humiliation et de désacralisation, qui touchait un symbole de l’identité collective, de la richesse et du prestige des vaincus.
Être un bon prince dans les Pays Roumains
(Résumé)
Les chroniques moldaves du XVIIe siècle – Leto... more Être un bon prince dans les Pays Roumains
(Résumé)
Les chroniques moldaves du XVIIe siècle – Letopiseţul Ţării Moldovei până la Aron vodă (La Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode), attribué à Grégoire Ureche, ainsi que celle d’après Aron voïvode, œuvre de Miron Costin – contiennent la description des caractères, des défauts et des qualités de certains princes de Moldavie et, exceptionnellement, le portrait d’un prince de Valachie. Pour les personnages caractérisés, les chroniqueurs ont retenu soit exclusivement des traits positifs, soit négatifs, soit les deux. La lecture en parallèle des chroniques et des Enseignements du prince de Valachie Neagoe Basarab à son fils Théodose – la première œuvre parénétique de la littérature roumaine, rédigée un siècle auparavant – prouve qu’entre les portraits princiers des chroniques et les recommandations pour un bon gouvernement de l’œuvre parénétique il y a bien de similitudes. La piété, les qualités militaires, le désir de paix, les aptitudes d’organisateur, la capacité de rendre justice de manière équitable et les vertus personnelles sont des traits communs tant au portrait idéal promu dans les Enseignements qu’aux portraits individuels des chroniques. Les exemples cités par l’auteur de la présente étude il en résulte que les chroniqueurs moldaves aient utilisés un modèle de bon prince (princeps bonus), construit autour de quelques vertus communes pour toute l’Europe chrétienne: pietas, pax, ordo et iustitia. À ces quatre vertus cardinales s’ajoutaient, en fonction de la personnalité du monarque et des circonstances historiques – la force, le courage, la fermeté, la clémence, la miséricorde, la tempérance et la sagesse.
La chronique attribuée à Grégoire Ureche contient six paragraphes avec „enseignements” et „réprimandes”, qui brisent la suite chronologique des évènements. Leur contenu se concentre autour des gestes faits par un roi de Pologne ou par des princes et des boyards moldaves, autrement dit des personnes de la sphère du pouvoir, directement impliquées dans l’acte de gouvernement. Les termes „enseignement” et „réprimande” en roumain ancien couvraient les directions autour desquelles était composé un écrit du type Fürstenspiegel. De même que Les Enseignements de Neagoe Basarab, les fragments de réflexion philosophico-politique de la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode sont des conseils et des avertissements concernant le gouvernement du pays, qui remplissent une fonction formatrice, visant le bon accomplissement de la mission que Dieu avait confiée aux souverains.
Une chronique „depuis la fondation du pays” – comme la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode – était non seulement une collection d’informations portant sur des évènements passés mais surtout une source de légitimité et en même temps un écrit à fonction moralisatrice, destinée à éduquer ceux élus pour gouverner le pays et soutenir sur des fondements historiques leur idéologie politique. L’auteur croit que bénéficiaires des modèles et des anti-modèles de princes qui se trouvent dans la chronique, mais également des paragraphes d’„enseignements” et de „réprimandes” dût être le prince moldave Basile Lupu (dont les efforts de trouver une place dans la succession des anciens souverains et de créer une monarchie héréditaire sont bien connus) et ses successeurs.
Boyards moldaves à l’aube de la vie d’État
Le but de cette étude est de souligner la nécessité d’... more Boyards moldaves à l’aube de la vie d’État
Le but de cette étude est de souligner la nécessité d’un changement de méthodologie dans les enquêtes prosopographiques concernant la Moldavie du XIVe siècle. Depuis la fondation de l’État médiéval moldave, au milieu de ce siècle, jusqu’en 1400, ont été conservés environ 20 documents sortis de la chancellerie princière. Ils contiennent les noms de moins de 70 boyards – trop peu pour nous donner une idée de l’élite sociale du nouvel État, de sa composition et de sa dynamique. En appliquant une grille de lecture différente aux documents et en utilisant des méthodes développées dans les recherches généalogiques, prosopographiques et onomastiques, l’auteur parvient finalement à dresser une liste de 108 noms des plus anciens boyards moldaves. Certains ne sont connus que de nom. Pour d’autres, on a identifié les propriétés, les résidences ou la postérité, ce qui révélait souvent des structures d’habitation et de parenté qui précédaient la naissance de l’État et qui subsistaient même après son organisation. Des recherches plus poussées et l’utilisation d’autres catégories de sources (telles que les noms de villages ou les obituaires) pourraient contribuer à l’enrichissement de la liste des noms et à une reconstitution plus précise du tissu social à l’aube de la vie d’État en Moldavie.
Spaţiul est-carpatic în secolele II a. Chr.-IV p. Chr.: între tradiţia antică şi interpretările m... more Spaţiul est-carpatic în secolele II a. Chr.-IV p. Chr.: între tradiţia antică şi interpretările moderne. I. Tradiţia antică (sursele literare
Această carte este protejată prin copyright. Reproducerea integrală sau parțială, multiplicarea p... more Această carte este protejată prin copyright. Reproducerea integrală sau parțială, multiplicarea prin orice mijloace și sub orice formă, cum ar fi xeroxarea, scanarea, transpunerea în format electronic sau audio, punerea la dispoziția publică, inclusiv prin internet sau prin rețelele de calculatoare, stocarea permanentă sau temporară pe dispozitive sau sisteme cu posibilitatea recuperării informațiilor, cu scop comercial sau gratuit, precum și alte fapte similare săvârșite fără permisiunea scrisă a deținătorului copyrightului reprezintă o încălcare a legislației cu privire la protecția proprietății intelectuale și se pedepsesc penal și/sau civil în conformitate cu legile în vigoare.
À la recherche des «dents de poisson»
Depuis le XVIe siècle, les sources historiques moldaves enr... more À la recherche des «dents de poisson»
Depuis le XVIe siècle, les sources historiques moldaves enregistrent une marchandise au nom bizarre, généralement importée de Moscou et qui était régulièrement envoyée à la Sublime Porte en tant que présents (peşkeş): les «dents de poisson». En essayant d’identifier cette marchandise inhabituelle, les chercheurs ont proposé, jusqu’à présent, plusieurs hypothèses: ivoire, carapaces de tortues, crocs de morse ou dent d’espadon. D’autre part, les termes utilisés pour définir le produit dans les sources russes, mais aussi orientales et chinoises, pourraient désigner à la fois l’ivoire de morse et de narval. À l’époque, la dent de narval était confondue avec la «corne de licorne» – une sorte de panacée universelle, qui avait la capacité de détecter et de neutraliser tout poison, de purifier l’eau, de guérir de nombreuses maladies et d’avoir des propriétés aphrodisiaques. La «corne de licorne» était aussi une marque de pouvoir et un objet de prestige, que tous les souverains devaient posséder. L’auteur de cet article rassemble et analyse toutes les pistes pour voir laquelle des hypothèses est la plus plausible. Enfin, à l’aide des informations offertes par plusieurs catégories de sources, mais aussi par les analogies, on peut conclure que les «dents de poisson» doivent être identifiées seulement aux crocs de morse.
Présents, marchandises et objets de prestige à la Cour de Moldavie au XVIe siècle
Les relations ... more Présents, marchandises et objets de prestige à la Cour de Moldavie au XVIe siècle
Les relations commerciales de la Moldavie forment un des sujets qui ont constamment retenu l’intérêt des médiévistes roumains. Des documents publiés depuis la seconde moitié du XIXe siècle ont permis d’éclaircir un certain nombre d’aspects: les réseaux de transport, la naissance et le développement des foires commerciales, le type de marchandises importées et exportées, le volume des transactions, les monnaies en circulation, les institutions, ethnies, familles et individus impliqués dans le commerce, etc. Les études pionnières de N. Iorga, I. Nistor, G. Zane, Radu Manolescu ou Alexandru I. Gonţa trouvent leur continuation aujourd’hui, avec de beaux résultats, dans des monographies, des études ou des volumes collectifs. Malheureusement, trop peu des produits coûteux qui sont arrivés en Moldavie sous forme de marchandises ou de présents ont résisté à l’épreuve du temps. Combiner des informations écrites avec des sources archéologiques et trouver des analogies avec des pièces similaires conservées dans des collections et des musées d’autres pays peut être une méthode pour reconstituer l’apparence, la qualité et la destination des objets qui, au-delà de leur utilisation pratique, avaient également le rôle de marques d’identité: ils signalaient la supériorité sociale de leur propriétaire. La présente étude essaie de les identifier et de saisir leur signification, en recherchant quelques étoffes (drap et brocart panni d’oro), certains vêtements et tissus (çatma et velours benek) reçus en cadeau de la Porte Ottomane, des gants, des carrosses et des montres. Les présents reçus par les princes et les boyards moldaves du XVIe siècle, ainsi que les biens achetés au profit de la Cour, ne permettent pas de parler d’une vie aristocratique comme celle de l’Europe occidentale. Cependant, les étoffes précieuses, les vêtements moins communs, les moyens de transport décorés, les instruments techniques extravagants, la nourriture et les boissons d’un certain raffinement, tout dessine l’image d’une Cour de l’Est, où princes et boyards, prenant des modèles à la fois occidentaux et orientaux, s’efforçaient, avec leurs propres ressources et moyens, d’être contemporains du monde dans lequel ils vivaient.
Alexandre Movilă inter alii. Avatars d’un portrait
L’auteur se propose d’examiner un tableau cons... more Alexandre Movilă inter alii. Avatars d’un portrait
L’auteur se propose d’examiner un tableau conservé dans la collection d’art du château de Konopištĕ (République tchèque), ayant appartenu autrefois à l’archiduc François-Ferdinand († 1914). Il s’agit d’un portrait à l’huile, non signé, d’un garçon de 11 à 12 ans, monté sur un cheval andalou et vêtu d’un magnifique costume de cérémonie d’inspiration polonaise, avec une petite épée sur la hanche. En 1913, Jerzy Mycielski a écrit, sans présenter ses arguments, que le portrait dépeint Jean-Casimir, fils du roi Sigismond III Vasa de Pologne (1587–1632) et de sa seconde épouse, Constance d’Autriche. Plus tard, on a remarqué que certains détails du costume du garçon ne correspondaient pas aux goûts vestimentaires de la Pologne des premières décennies du XVIIe siècle. Par conséquent, en 1986, Mieczysław Morka a émis l’hypothèse que le personnage du tableau pourrait être Alexandre Movilă (Mogila), le fils de Jérémie Movilă, prince de Moldavie (1595–1606), dont les liens avec la Pologne sont bien connus. Selon cet auteur, le tableau aurait été peint en 1615, lorsqu’Alexandre lui-même est devenu prince de Moldavie. Mais l’âge du prince moldave ne supporte pas cette attribution: né en 1601, Alexandre avait 14 ans en 1615, bien plus que l’enfant en costume polonais. En 1988, Jan K. Ostrowski et Jerzy T. Petrus ont montré que, dans les premières décennies du XVIIe siècle, la mode polonaise était répandue aussi à la cour florentine du grand-duc de Toscane, Côme II de Médicis (1609–1621), beau-frère du roi Sigismond III Vasa. Les deux chercheurs ont proposé d’identifier l’enfant du tableau avec l’un des fils de Côme – Léopold ou Ferdinand, et le peintre, avec Justus Sustermans, l’artiste de la cour des Médicis. Ils ont également daté le portrait vers 1625–1630. Enfin, dans une étude publiée en 1998, Magdalena Piwocka a démontré, d’une manière convaincante et avec de nombreux arguments, que le modèle du portrait équestre était Ferdinand II de Médicis, grand-duc de Toscane (1621–1670), que le peintre est vraiment le portraitiste Justus Sustermans d’Anvers et que le tableau a été réalisé en 1621–1622. Cependant, en 2017, lorsque la Galerie des Offices de Florence a organisé une exposition consacrée à «Léopold de Médicis, prince des collectionneurs», la peinture de Konopištĕ a été utilisée pour illustrer l’affiche et la couverture du catalogue, les commissaires de l’exposition voyant dans le petit cavalier le futur cardinal Léopold, peint vers 1624–1625 par Justus Sustermans. Malgré cette attribution, d’autres arguments (la robe grise du cheval, la représentation équestre du personnage, le caractère officiel du portrait, son message politique et idéologique) soutiennent la démonstration de Magdalena Piwocka. Le seul enfant de Côme II qui aurait pu être peint dans un tableau comme celui de Konopištĕ était Ferdinand II de Médicis, devenu grand-duc de Toscane en 1621, à l’âge de 11 ans.
Tradition et mémoire dans O samă de cuvinte (Récits choisis) de Ion Neculce
O samă de cuvinte (Ré... more Tradition et mémoire dans O samă de cuvinte (Récits choisis) de Ion Neculce
O samă de cuvinte (Récits choisis) est un recueil de brefs récits écrits par le maréchal (dvornik) Ion Neculce, chroniqueur moldave († 1745). Chronologiquement, leur action est placée entre le moment de la fondation de l’État moldave et le règne de Ştefăniţă Lupu (1659–1661). Il semble que ces histoires aient été élaborées, comme la chronique du même auteur, en plusieurs étapes, dans la première moitié du XVIIIe siècle. Les recherches menées sur ces écrits ont prouvé qu’ils ne sont pas de simples fantaisies littéraires, mais des légendes tissues autour des faits historiques. Certaines d’entre elles sont inspirées par des sources écrites (chroniques plus anciennes), mais la plupart ont été racontées à l’auteur par des personnes connues tout au long de sa vie, par des membres de sa propre famille et par des représentants d’autres familles nobles moldaves (Cantacuzino, Purice, Tăutu etc.) et par des moines des monastères Putna, Slatina et peut-être Probota. Cette étude essaie de surprendre – en appliquant les principes théoriques et les méthodes utilisées dans la série de volumes coordonnés par Pierre Nora – la manière dont la mémoire (individuelle ou collective) est incarnée dans les histoires de Ion Neculce et d’identifier les dimensions (historiographique, littéraire, ethnographique etc.) qui les structurent. L’objectif est de déterminer si O samă de cuvinte (Récits choisis) peuvent être considérés comme un lieu de mémoire pour les Roumains.
Political Contention and Forms of Violence in the Romanian Principalities (16th–17th Centuries)
I... more Political Contention and Forms of Violence in the Romanian Principalities (16th–17th Centuries)
In the 16th and 17th centuries, the Romanian Principalities lacked treatises of political theory or compendia of comments on works of classical philosophy with references to practices of political governance. For this reason, people’s perceptions of political contention and its outcomes can only be reconstructed starting from the odd allusion and comment scattered in the period’s written sources.
In the Romanian Principalities the deposition of princes through violence was not routine practice, but the extreme solution to a political deadlock. Recourse to this form of violence can be explained by the lack of a clear, immutable system of succession. At the same time, the small number of princely assassinations must be connected to a conception of the monarch’s body as having a mystical dimension, as being sacred, immortal and intangible. If we attempt to construct a typology of the protesters, the first thing we notice is that the initiators and leaders of the protest movements were always members of the noble class (boyars). On the one hand, as members of the country’s political apparatus, the boyars had all the inside information and could identify correctly the right moment for an intervention. Their uprisings invariably took place in politically unstable moments and as such they are reliable indicators of major crises. On the other hand, as wealthy property-owners, only the boyars had the resources needed for sending envoys, for travelling inside and outside the country’s borders, and for assembling and maintaining armies. The pressure groups were not formed randomly, but more often than not relied on alliances founded on kinship, intermarriage or ritual. Such a group needed a leader – an individual who took the initiative and had the means of attracting like-minded malcontents. Participation in political contention was a major risk, which the participants acknowledged and accepted. Therefore, the links between leader and associates had to rely on discretion, trust and mutual loyalty (in some cases sealed by a binding oath).
Some expressions of violence were considered legitimate and, as such, were tolerated by society; however, excessive violence – i.e. non-legitimate violence – was denounced and penalized. Violence against the ruling prince, irrespective of the causes, was not condoned and, when it happened, had to be justified and defended in the eyes of contemporaries and posterity alike through a discourse which presented the slain monarch as having departed from the model of the ideal sovereign and as having failed to fulfil his duties to the subjects. A prince’s assassination was a way of eliminating an unjust tyrant, thereby also removing the principles, norms and values he promoted. Even though most sources do not indicate the deeper causes of contention, it is likely that rather than being random acts of insubordination, such movements were the outcome of real, serious and deep-seated grievances, with solid ideological foundations.
Editura Argonaut este acreditată CNCSIS/CNCS din anul 2002 Descrierea CIP a Bibliotecii Naţionale... more Editura Argonaut este acreditată CNCSIS/CNCS din anul 2002 Descrierea CIP a Bibliotecii Naţionale a României Istoria ca interogaţie: Mariei Crăciun, la o aniversare / vol. coord. de Carmen Florea şi Greta-Monica Miron. -Cluj-Napoca: Argonaut: Mega, 2020 ISBN 978-973-109-921-7 ISBN 978-606-020-139-7 I. Florea, Carmen (coord.) II. Miron, Greta-Monica (coord.) 94 CUPRINS CUVÂNT ÎNAINTE 11 Gheorghe NEGUSTOR BIBLIOGRAFIE SELECTIVĂ 13
La violence – instrument du pouvoir dans la Moldavie d’Étienne le Grand
La recherche du point de ... more La violence – instrument du pouvoir dans la Moldavie d’Étienne le Grand
La recherche du point de vue comparatif des épisodes cruels et sanglants du règne d’Étienne le Grand, prince de Moldavie (1457–1504), met en lumière des aspects non relevés jusqu’à présent et donne des nuances aux conclusions déjà formulées à ce sujet. On a démontré, il y a quelques années, avec des arguments solides, que les scènes de violence dans les chroniques de l’époque d’Étienne le Grand ont été calquées sur l’Ancien Testament et les écrits apocalyptiques, que le prince de Moldavie semble avoir suivi, en sa qualité assumée de «dernier empereur», vainqueur des infidèles et pacificateur avant la fin du monde. Certaines actions violentes d’Étienne le Grand sont similaires à celles attribuées à Vlad l’Empaleur, prince de Valachie, dans des histoires qui ont connu un réel succès d’un bout à l’autre de l’Europe, au-delà des frontières politiques ou religieuses. Ce qui ne nous permet pas cependant de supposer que les deux princes étaient animés des mêmes goûts morbides. En réalité, nous avons affaire à la même gamme de gestes de pouvoir, spécifiques aux souverains médiévaux qui, suivant le modèle du princeps justus, avaient le droit – même le devoir – d’utiliser la violence pour inspirer la peur. La difficulté consiste à remarquer la différence entre la «violence légitime de l’État» et la «violence privée illégitime» (Hans-Jacob Orning). Cette dernière était associée à la cruauté, considérée comme un vice pour un monarque chrétien. Avec la cupidité et la sévérité excessive, elle caractérisait le règne des tyrans. Le recours à la violence légitime par Étienne le Grand était une composante de son exercice du pouvoir, nécessaire pour créer et maintenir l’insécurité et la peur, afin que les opposants, de l’intérieur ou de l’extérieur, n’osent rien faire d’autre que se soumettre. Des décisions surprenantes, des menaces, des attaques inattendues, des châtiments sanglants faisaient partie du mécanisme complexe de gouvernance des souverains de droit divin, autocrates, dont l’autorité reposait non seulement sur le soutien volontaire, mais aussi sur la peur.
Le miroir du pouvoir. Le règne d’Étienne le Grand et la Cronica breviter scripta
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Les auteurs reprennent l’analyse d’une source narrative du XVe siècle, Cronica breviter scripta Stephani Dei gratia voivoda terrarum Moldannens(ium) necnon Valachyens(ium), connue dans l’historiographie sous le nom de Chronique moldave-allemande. Découverte et publiée par le savant polonais Olgierd Górka (1887–1955), cette chronique a retenu l’attention des spécialistes qui lui ont consacré des articles et des études spéciales. On sait aujourd’hui que la traduction allemande est datée le 28 avril 1502, que l’auteur de la copie est l’humaniste allemand Hartmann Schedel, médecin à Nuremberg et auteur de l’ouvrage Liber chronicarum, publié en 1493, que, dans la source slave qui a servi à la traduction, la description des événements doit avoir été interrompue en 1486 et que la dernière partie de la copie allemande, couvrant la période 1488–1499, a été ajoutée plus tard.
La présente recherche se propose d’ajouter à ces conclusions quelques autres nouvelles observations. La Cronica breviter scripta est la traduction d’une version de la chronique slave de la Cour moldave, parvenue dans le monde allemand avant 1497–1500. Ce prototype, prêt à être envoyé en Occident, fut achevé entre l’été 1496 et l’automne 1497. Le témoin de tous les événements décrits et le participant à toutes les campagnes militaires, le seul qui aurait pu fournir des informations détaillées à leur sujet ne pouvait être qu’Étienne le Grand lui-même. Il semble que, pour tracer le portrait du prince, l’auteur de cette source soit parti non pas des événements historiques, mais d’un portrait-modèle en vertu duquel il a choisi les moments ou les circonstances les plus évocatrices. Mais c’est là une technique utilisée dans les textes narratifs de propagande, dans laquelle la sélection des faits a le but de créer l’image d’un État ou d’un souverain dans un contexte approprié et sous un jour favorable. Par conséquent, la source originale de la Cronica breviter scripta n’est pas seulement un texte narratif contemporain du règne d’Étienne le Grand, mais l’histoire officielle de 1457–1486, présentée du point de vue de son héros principal et dans le but évident d’offrir au monde extérieur de la Moldavie l’image de son souverain, construite selon le modèle du prince idéal.
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Papers by Maria Magdalena Székely
L’étude analyse l’apparition d’une comète (nommée plus tard de Halley) en 1531, dans le contexte du conflit militaire entre la Moldavie et la Pologne. La traversée du ciel par une comète pendant l’été de cette année a été enregistrée par de nombreux témoignages de l’époque, tant en Europe qu’en Asie, mais dans les sources de Valachie et de Moldavie, contemporaines de l’événement, elle n’a laissé aucune trace. Les chroniqueurs polonais placent l’apparition de l’astre à des dates différentes, selon les événements militaires déployés sur le terrain : soit lorsque les troupes polonaises ont traversé le Dniestr (le 1er août), soit lors de la bataille d’Obertyn (le 22 août). D’après Stanisław Gorski, la comète est apparue le 12 août, le phénomène faisant espérer les combattants que l’étoile leur prédise, du ciel, une brillante victoire, car elle ressemblait aux armoiries de leur commandant, l’hetman Jan Tarnowski. Le chroniqueur saxon Hieronymus Ostermayer ajoute le détail que la comète a été visible pendant cinq jours. En tenant compte de tous les témoignages disponibles, l’auteur conclut que le phénomène céleste aurait été visible approximativement entre le 12 et le 16 août ; durant cet intervalle, aucun événement important ne s’était produit au sol. Cependant, les auteurs polonais l’ont transformé en signe de victoire et ont placé le moment de son apparition soit au début du conflit moldo-polonais, soit à sa fin, tel que le narrateur l’a jugé plus approprié ou suggestif. L’association de l’étoile brillante et lumineuse dans le ciel avec l’étoile d’or sur le champ d’azur des armoiries de Jan Tarnowski (le herb Leliwa) est la dernière et la plus convaincante preuve que le phénomène astronomique de l’été 1531 ait été utilisé comme moyen de propagande politique en faveur des Polonais. Voilà pourquoi le chroniqueur moldave Macaire n’a pas ressenti le besoin d’invoquer son apparition dans la description de la campagne terminée d’une manière désastreuse pour son prince, Pierre Rareş.
En 2004, l’auteur a cosigné, avec M. Ştefan S. Gorovei, une étude consacrée aux emblèmes impériaux de la princesse Marie Assanine Paléologuine, épouse d’Étienne le Grand, prince de Moldavie (1457–1504). Après presque deux décennies, le sujet est repris, cette fois-ci du point de vue historiographique.
L’étude ci-présente est composée de deux volets. Dans le premier, on passe en revue les titres qui, en 2004, ont été perdus de vue ou qui n’ont pas été retrouvés dans les bibliothèques fréquentées à l’époque. Les textes, résumés dans l’ordre chronologique de leur publication, ne changent en rien la démonstration et les conclusions initiales, mais, par contre, les confirment et les renforcent: le monogramme des Paléologues a été un signe caractéristique pour les membres de cette famille et seulement pour eux, un signe qui soulignait leur appartenance généalogique à la dynastie des derniers empereurs byzantins. L’association du monogramme à l’aigle bicéphale, «les bâtons parallèles», «le losange ouvert» ou le swastika (la croix gammée) fait de chacun d’eux des symboles du pouvoir impérial.
Le deuxième volet est consacré à l’analyse de la nouvelle bibliographie consacrée – directement ou tangentiellement – aux emblèmes des Paléologues. Il s’agit de conférences et d’articles rédigés après 2004 par Paul Canart, Bojan Popović, Robert Ousterhout, Jasmina S. Ćirić, Ştefan S. Gorovei, R. P. Gabriel Herea, Paschalis Androudis, Pagona Papadopoulou et Cécile Morrisson ou le moine Alexie Cojocaru. À quelques exceptions près, les insignes de famille et de pouvoir des Paléologues ont été étudiés seulement dans leurs représentations byzantines et éventuellement dans leurs échos ou répliques du monde sud-slave. Mais, omettre de la discussion les emblèmes brodés sur la couverture de tombeau de la princesse Marie Assanine Paléologuine et ceux qui proviennent de la principauté d’origine de cette princesse, Theodoro (Mangop), appauvrit la sémiotique politique de l’Empire byzantin et empêche une compréhension nuancée de la circulation et du transfert de symboles – porteurs, quel que soit le lieu, des mêmes messages idéologiques. Il faut du temps pour que les résultats d’une recherche soient connus et assimilés dans le circuit scientifique, mais allonger excessivement cet intervalle peut être un signe d’ignorance ou d’arrogance. La méconnaissance des résultats obtenus par d’autres chercheurs dans un domaine d’intérêt commun a attiré la formulation, à plusieurs reprises, d’observations déjà faites et de questions qui avaient trouvé entre-temps leur réponse. Lire et publier en plusieurs endroits le même texte, au fil des années, sans mettre à jour l’appareil critique, est une pratique inacceptable dans le monde académique. Malheureusement, l’autorité scientifique de certains auteurs repose, assez souvent, sur de tels procédés, et sur cette autorité repose leur crédibilité. Ensuite, cette crédibilité devient un gage de compétence. Les emblèmes paléologues du pouvoir souverain – représentés sur
divers supports et dans une large aire géographique – auraient pu devenir l’un de ces objets d’étude qui prouvent la rigueur, la compétence et la bonne foi des spécialistes en la matière. Le bref bilan historiographique dressé ici montre pourtant qu’il n’en est pas du tout ainsi.
Les documents du premier siècle et demi de l’existence de la principauté moldave contiennent parfois des mentions de maisons ou de cours de certains propriétaires, dans des formules telles que: «où était la maison» et «où était la cour». La présente recherche tente de déchiffrer le sens de ces indications et de découvrir s’ils peuvent contribuer à la reconstitution
de certaines structures de résidence et de propriété d’une époque pour
laquelle les témoignages écrits sont très peu nombreux ou totalement
absents. L’analyse des sources met en lumière quelques observations
intéressantes. Dès le début, il faut préciser qu’il n’y a aucune raison de
considérer les termes maison (sl. domá) et cour (sl. dvorá) comme
synonymes. Les sources écrites et archéologiques prouvent que, pour
nos aïeux des XIVe et XVe siècles, cour signifiait un ensemble bâti sur
une hauteur naturelle (colline, butte, crête), généralement dans un lieu
à forte visibilité, clôturé et composé de la maison du propriétaire – une
structure en maçonnerie –, des dépendances et d’une église-nécropole.
Comme les sources font la distinction entre cour et maison, il faut
supposer que ce dernier terme désignait simplement une habitation,
soit en bois, soit en pierre et briques. La cour comprenait nécessairement une maison, mais une maison ne comprenait en aucun cas une cour. Par conséquent, le terme cour pourrait également être utilisé dans le sens étroit d’habitation – comme il apparaît dans certains cas dans les documents moldaves –, mais le mot maison ne pourrait pas définir l’ensemble du complexe résidentiel, avec tous ses bâtiments, y compris l’église. Les cours étaient situées soit dans des villages individualisés par leur nom, soit dans des villages anonymes, situées au bord de certaines rivières, soit dans une zone connue sous le nom de Champ de Dragoş (Câmpul lui Dragoş). Certains villages où se trouvaient des maisons ou des cours des boyards recevaient les noms de leurs propriétaires. Cartographier toutes les maisons et les cours documentées tout au long du XVe siècle permettrait d’avoir une idée plus concrète de l’emplacement de ces résidences et pourrait fournir des indices sur la valeur économique de ces points, en fonction de leur proximité à des routes et des cours d’eau, c’est-à-dire à des voies de communication de l’époque. C’est d’autant plus important que le rôle militaire des cours des boyards en Moldavie ne semble pas avoir été si significatif qu’on le pensait. Une carte pourrait faciliter la recherche et la localisation, par des moyens modernes d’identification, de sites qui méritent une enquête systématique. Il faudrait ensuite voir, par des recherches généalogiques et prosopographiques, qui étaient les propriétaires des maisons, qui des cours, et si une différence sociale ou économique peut être observée entre eux.
La chronique attribuée à Grégoire Ureche contient six paragraphes avec „enseignements” et „réprimandes”, qui brisent la suite chronologique des évènements. Leur contenu se concentre autour des gestes faits par un roi de Pologne ou par des princes et des boyards moldaves, autrement dit des personnes de la sphère du pouvoir, directement impliquées dans l’acte de gouvernement. Les termes „enseignement” et „réprimande” en roumain ancien couvraient les directions autour desquelles était composé un écrit du type Fürstenspiegel. De même que Les Enseignements de Neagoe Basarab, les fragments de réflexion philosophico-politique de la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode sont des conseils et des avertissements concernant le gouvernement du pays, qui remplissent une fonction formatrice, visant le bon accomplissement de la mission que Dieu avait confiée aux souverains.
Une chronique „depuis la fondation du pays” – comme la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode – était non seulement une collection d’informations portant sur des évènements passés mais surtout une source de légitimité et en même temps un écrit à fonction moralisatrice, destinée à éduquer ceux élus pour gouverner le pays et soutenir sur des fondements historiques leur idéologie politique. L’auteur croit que bénéficiaires des modèles et des anti-modèles de princes qui se trouvent dans la chronique, mais également des paragraphes d’„enseignements” et de „réprimandes” dût être le prince moldave Basile Lupu (dont les efforts de trouver une place dans la succession des anciens souverains et de créer une monarchie héréditaire sont bien connus) et ses successeurs.
L’étude comporte deux volets, puisqu’il s’agit de deux épisodes de la campagne militaire de Bogdan III (1504–1517) dans le royaume de Pologne en 1509. Le premier, décrit par des chroniqueurs moldaves des XVIIe et XVIIIe siècles, se rapporte à un geste du prince de Moldavie qui, au début du siège de la forteresse de Lwów, jeta sa lance vers la porte de la fortification. Comme l’ont démontré les historiens Ovidiu Cristea et, après lui, Katarzyna Niemczyk, le geste avait une valeur symbolique, étant compris comme une déclaration de guerre, comme un défi au combat ouvert. En faveur de cette interprétation, l’auteur de la présente étude fournit des exemples supplémentaires, tirés des écrits de Diodore de Sicile, Tite-Live, Dio Cassius et Ammien Marcellin, et réitère l’idée que jeter la lance dans le territoire ennemi est, plus que probablement, un topos, emprunté soit directement aux auteurs antiques, soit par l’intermédiaire de penseurs comme Hugo Grotius ou Samuel Rachelius, qui, concentrés sur les fondements juridiques des guerres, ont fait de nombreuses références à l’antiquité classique.
Le deuxième épisode, raconté à la fois par des chroniqueurs moldaves et polonais, a eu lieu dans la ville de Rohatyn, d’où Bogdan III a enlevé la grande cloche de l’église comme butin de guerre pour l’apporter à Suceava où se trouvait le siège métropolitain de sa principauté. Katarzyna Niemczyk estime que le pillage de la ville de Rohatyn, qui appartenait au domaine de la famille de Chodecz, ainsi que l’enlèvement de la cloche auraient été un acte de vengeance du prince de Moldavie contre le noble polonais Stanisław de Chodecz, qu’il considérait coupable de l’échec de son projet de mariage avec la sœur du roi Alexandre de Pologne, quelques années auparavant. Mais, comme l’auteur du texte ci-dessus l’a montré déjà en 2011, avec de nombreux exemples et analogies, la prise d’une cloche en captivité était, dans toute l’Europe médiévale et prémoderne, un geste de pouvoir, propre aux souverains et aux seigneurs. Les sources du temps, tant celles de l’Europe de l’Est que celles de l’Occident, qui mentionnent de tels événements, sont catégoriques à cet égard. En conclusion, l’enlèvement de la cloche de Rohatyn ne peut être interprété uniquement en termes de vengeance personnelle, mais aussi comme une forme de punition, d’humiliation et de désacralisation, qui touchait un symbole de l’identité collective, de la richesse et du prestige des vaincus.
(Résumé)
Les chroniques moldaves du XVIIe siècle – Letopiseţul Ţării Moldovei până la Aron vodă (La Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode), attribué à Grégoire Ureche, ainsi que celle d’après Aron voïvode, œuvre de Miron Costin – contiennent la description des caractères, des défauts et des qualités de certains princes de Moldavie et, exceptionnellement, le portrait d’un prince de Valachie. Pour les personnages caractérisés, les chroniqueurs ont retenu soit exclusivement des traits positifs, soit négatifs, soit les deux. La lecture en parallèle des chroniques et des Enseignements du prince de Valachie Neagoe Basarab à son fils Théodose – la première œuvre parénétique de la littérature roumaine, rédigée un siècle auparavant – prouve qu’entre les portraits princiers des chroniques et les recommandations pour un bon gouvernement de l’œuvre parénétique il y a bien de similitudes. La piété, les qualités militaires, le désir de paix, les aptitudes d’organisateur, la capacité de rendre justice de manière équitable et les vertus personnelles sont des traits communs tant au portrait idéal promu dans les Enseignements qu’aux portraits individuels des chroniques. Les exemples cités par l’auteur de la présente étude il en résulte que les chroniqueurs moldaves aient utilisés un modèle de bon prince (princeps bonus), construit autour de quelques vertus communes pour toute l’Europe chrétienne: pietas, pax, ordo et iustitia. À ces quatre vertus cardinales s’ajoutaient, en fonction de la personnalité du monarque et des circonstances historiques – la force, le courage, la fermeté, la clémence, la miséricorde, la tempérance et la sagesse.
La chronique attribuée à Grégoire Ureche contient six paragraphes avec „enseignements” et „réprimandes”, qui brisent la suite chronologique des évènements. Leur contenu se concentre autour des gestes faits par un roi de Pologne ou par des princes et des boyards moldaves, autrement dit des personnes de la sphère du pouvoir, directement impliquées dans l’acte de gouvernement. Les termes „enseignement” et „réprimande” en roumain ancien couvraient les directions autour desquelles était composé un écrit du type Fürstenspiegel. De même que Les Enseignements de Neagoe Basarab, les fragments de réflexion philosophico-politique de la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode sont des conseils et des avertissements concernant le gouvernement du pays, qui remplissent une fonction formatrice, visant le bon accomplissement de la mission que Dieu avait confiée aux souverains.
Une chronique „depuis la fondation du pays” – comme la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode – était non seulement une collection d’informations portant sur des évènements passés mais surtout une source de légitimité et en même temps un écrit à fonction moralisatrice, destinée à éduquer ceux élus pour gouverner le pays et soutenir sur des fondements historiques leur idéologie politique. L’auteur croit que bénéficiaires des modèles et des anti-modèles de princes qui se trouvent dans la chronique, mais également des paragraphes d’„enseignements” et de „réprimandes” dût être le prince moldave Basile Lupu (dont les efforts de trouver une place dans la succession des anciens souverains et de créer une monarchie héréditaire sont bien connus) et ses successeurs.
Le but de cette étude est de souligner la nécessité d’un changement de méthodologie dans les enquêtes prosopographiques concernant la Moldavie du XIVe siècle. Depuis la fondation de l’État médiéval moldave, au milieu de ce siècle, jusqu’en 1400, ont été conservés environ 20 documents sortis de la chancellerie princière. Ils contiennent les noms de moins de 70 boyards – trop peu pour nous donner une idée de l’élite sociale du nouvel État, de sa composition et de sa dynamique. En appliquant une grille de lecture différente aux documents et en utilisant des méthodes développées dans les recherches généalogiques, prosopographiques et onomastiques, l’auteur parvient finalement à dresser une liste de 108 noms des plus anciens boyards moldaves. Certains ne sont connus que de nom. Pour d’autres, on a identifié les propriétés, les résidences ou la postérité, ce qui révélait souvent des structures d’habitation et de parenté qui précédaient la naissance de l’État et qui subsistaient même après son organisation. Des recherches plus poussées et l’utilisation d’autres catégories de sources (telles que les noms de villages ou les obituaires) pourraient contribuer à l’enrichissement de la liste des noms et à une reconstitution plus précise du tissu social à l’aube de la vie d’État en Moldavie.
Depuis le XVIe siècle, les sources historiques moldaves enregistrent une marchandise au nom bizarre, généralement importée de Moscou et qui était régulièrement envoyée à la Sublime Porte en tant que présents (peşkeş): les «dents de poisson». En essayant d’identifier cette marchandise inhabituelle, les chercheurs ont proposé, jusqu’à présent, plusieurs hypothèses: ivoire, carapaces de tortues, crocs de morse ou dent d’espadon. D’autre part, les termes utilisés pour définir le produit dans les sources russes, mais aussi orientales et chinoises, pourraient désigner à la fois l’ivoire de morse et de narval. À l’époque, la dent de narval était confondue avec la «corne de licorne» – une sorte de panacée universelle, qui avait la capacité de détecter et de neutraliser tout poison, de purifier l’eau, de guérir de nombreuses maladies et d’avoir des propriétés aphrodisiaques. La «corne de licorne» était aussi une marque de pouvoir et un objet de prestige, que tous les souverains devaient posséder. L’auteur de cet article rassemble et analyse toutes les pistes pour voir laquelle des hypothèses est la plus plausible. Enfin, à l’aide des informations offertes par plusieurs catégories de sources, mais aussi par les analogies, on peut conclure que les «dents de poisson» doivent être identifiées seulement aux crocs de morse.
Les relations commerciales de la Moldavie forment un des sujets qui ont constamment retenu l’intérêt des médiévistes roumains. Des documents publiés depuis la seconde moitié du XIXe siècle ont permis d’éclaircir un certain nombre d’aspects: les réseaux de transport, la naissance et le développement des foires commerciales, le type de marchandises importées et exportées, le volume des transactions, les monnaies en circulation, les institutions, ethnies, familles et individus impliqués dans le commerce, etc. Les études pionnières de N. Iorga, I. Nistor, G. Zane, Radu Manolescu ou Alexandru I. Gonţa trouvent leur continuation aujourd’hui, avec de beaux résultats, dans des monographies, des études ou des volumes collectifs. Malheureusement, trop peu des produits coûteux qui sont arrivés en Moldavie sous forme de marchandises ou de présents ont résisté à l’épreuve du temps. Combiner des informations écrites avec des sources archéologiques et trouver des analogies avec des pièces similaires conservées dans des collections et des musées d’autres pays peut être une méthode pour reconstituer l’apparence, la qualité et la destination des objets qui, au-delà de leur utilisation pratique, avaient également le rôle de marques d’identité: ils signalaient la supériorité sociale de leur propriétaire. La présente étude essaie de les identifier et de saisir leur signification, en recherchant quelques étoffes (drap et brocart panni d’oro), certains vêtements et tissus (çatma et velours benek) reçus en cadeau de la Porte Ottomane, des gants, des carrosses et des montres. Les présents reçus par les princes et les boyards moldaves du XVIe siècle, ainsi que les biens achetés au profit de la Cour, ne permettent pas de parler d’une vie aristocratique comme celle de l’Europe occidentale. Cependant, les étoffes précieuses, les vêtements moins communs, les moyens de transport décorés, les instruments techniques extravagants, la nourriture et les boissons d’un certain raffinement, tout dessine l’image d’une Cour de l’Est, où princes et boyards, prenant des modèles à la fois occidentaux et orientaux, s’efforçaient, avec leurs propres ressources et moyens, d’être contemporains du monde dans lequel ils vivaient.
L’auteur se propose d’examiner un tableau conservé dans la collection d’art du château de Konopištĕ (République tchèque), ayant appartenu autrefois à l’archiduc François-Ferdinand († 1914). Il s’agit d’un portrait à l’huile, non signé, d’un garçon de 11 à 12 ans, monté sur un cheval andalou et vêtu d’un magnifique costume de cérémonie d’inspiration polonaise, avec une petite épée sur la hanche. En 1913, Jerzy Mycielski a écrit, sans présenter ses arguments, que le portrait dépeint Jean-Casimir, fils du roi Sigismond III Vasa de Pologne (1587–1632) et de sa seconde épouse, Constance d’Autriche. Plus tard, on a remarqué que certains détails du costume du garçon ne correspondaient pas aux goûts vestimentaires de la Pologne des premières décennies du XVIIe siècle. Par conséquent, en 1986, Mieczysław Morka a émis l’hypothèse que le personnage du tableau pourrait être Alexandre Movilă (Mogila), le fils de Jérémie Movilă, prince de Moldavie (1595–1606), dont les liens avec la Pologne sont bien connus. Selon cet auteur, le tableau aurait été peint en 1615, lorsqu’Alexandre lui-même est devenu prince de Moldavie. Mais l’âge du prince moldave ne supporte pas cette attribution: né en 1601, Alexandre avait 14 ans en 1615, bien plus que l’enfant en costume polonais. En 1988, Jan K. Ostrowski et Jerzy T. Petrus ont montré que, dans les premières décennies du XVIIe siècle, la mode polonaise était répandue aussi à la cour florentine du grand-duc de Toscane, Côme II de Médicis (1609–1621), beau-frère du roi Sigismond III Vasa. Les deux chercheurs ont proposé d’identifier l’enfant du tableau avec l’un des fils de Côme – Léopold ou Ferdinand, et le peintre, avec Justus Sustermans, l’artiste de la cour des Médicis. Ils ont également daté le portrait vers 1625–1630. Enfin, dans une étude publiée en 1998, Magdalena Piwocka a démontré, d’une manière convaincante et avec de nombreux arguments, que le modèle du portrait équestre était Ferdinand II de Médicis, grand-duc de Toscane (1621–1670), que le peintre est vraiment le portraitiste Justus Sustermans d’Anvers et que le tableau a été réalisé en 1621–1622. Cependant, en 2017, lorsque la Galerie des Offices de Florence a organisé une exposition consacrée à «Léopold de Médicis, prince des collectionneurs», la peinture de Konopištĕ a été utilisée pour illustrer l’affiche et la couverture du catalogue, les commissaires de l’exposition voyant dans le petit cavalier le futur cardinal Léopold, peint vers 1624–1625 par Justus Sustermans. Malgré cette attribution, d’autres arguments (la robe grise du cheval, la représentation équestre du personnage, le caractère officiel du portrait, son message politique et idéologique) soutiennent la démonstration de Magdalena Piwocka. Le seul enfant de Côme II qui aurait pu être peint dans un tableau comme celui de Konopištĕ était Ferdinand II de Médicis, devenu grand-duc de Toscane en 1621, à l’âge de 11 ans.
O samă de cuvinte (Récits choisis) est un recueil de brefs récits écrits par le maréchal (dvornik) Ion Neculce, chroniqueur moldave († 1745). Chronologiquement, leur action est placée entre le moment de la fondation de l’État moldave et le règne de Ştefăniţă Lupu (1659–1661). Il semble que ces histoires aient été élaborées, comme la chronique du même auteur, en plusieurs étapes, dans la première moitié du XVIIIe siècle. Les recherches menées sur ces écrits ont prouvé qu’ils ne sont pas de simples fantaisies littéraires, mais des légendes tissues autour des faits historiques. Certaines d’entre elles sont inspirées par des sources écrites (chroniques plus anciennes), mais la plupart ont été racontées à l’auteur par des personnes connues tout au long de sa vie, par des membres de sa propre famille et par des représentants d’autres familles nobles moldaves (Cantacuzino, Purice, Tăutu etc.) et par des moines des monastères Putna, Slatina et peut-être Probota. Cette étude essaie de surprendre – en appliquant les principes théoriques et les méthodes utilisées dans la série de volumes coordonnés par Pierre Nora – la manière dont la mémoire (individuelle ou collective) est incarnée dans les histoires de Ion Neculce et d’identifier les dimensions (historiographique, littéraire, ethnographique etc.) qui les structurent. L’objectif est de déterminer si O samă de cuvinte (Récits choisis) peuvent être considérés comme un lieu de mémoire pour les Roumains.
In the 16th and 17th centuries, the Romanian Principalities lacked treatises of political theory or compendia of comments on works of classical philosophy with references to practices of political governance. For this reason, people’s perceptions of political contention and its outcomes can only be reconstructed starting from the odd allusion and comment scattered in the period’s written sources.
In the Romanian Principalities the deposition of princes through violence was not routine practice, but the extreme solution to a political deadlock. Recourse to this form of violence can be explained by the lack of a clear, immutable system of succession. At the same time, the small number of princely assassinations must be connected to a conception of the monarch’s body as having a mystical dimension, as being sacred, immortal and intangible. If we attempt to construct a typology of the protesters, the first thing we notice is that the initiators and leaders of the protest movements were always members of the noble class (boyars). On the one hand, as members of the country’s political apparatus, the boyars had all the inside information and could identify correctly the right moment for an intervention. Their uprisings invariably took place in politically unstable moments and as such they are reliable indicators of major crises. On the other hand, as wealthy property-owners, only the boyars had the resources needed for sending envoys, for travelling inside and outside the country’s borders, and for assembling and maintaining armies. The pressure groups were not formed randomly, but more often than not relied on alliances founded on kinship, intermarriage or ritual. Such a group needed a leader – an individual who took the initiative and had the means of attracting like-minded malcontents. Participation in political contention was a major risk, which the participants acknowledged and accepted. Therefore, the links between leader and associates had to rely on discretion, trust and mutual loyalty (in some cases sealed by a binding oath).
Some expressions of violence were considered legitimate and, as such, were tolerated by society; however, excessive violence – i.e. non-legitimate violence – was denounced and penalized. Violence against the ruling prince, irrespective of the causes, was not condoned and, when it happened, had to be justified and defended in the eyes of contemporaries and posterity alike through a discourse which presented the slain monarch as having departed from the model of the ideal sovereign and as having failed to fulfil his duties to the subjects. A prince’s assassination was a way of eliminating an unjust tyrant, thereby also removing the principles, norms and values he promoted. Even though most sources do not indicate the deeper causes of contention, it is likely that rather than being random acts of insubordination, such movements were the outcome of real, serious and deep-seated grievances, with solid ideological foundations.
La recherche du point de vue comparatif des épisodes cruels et sanglants du règne d’Étienne le Grand, prince de Moldavie (1457–1504), met en lumière des aspects non relevés jusqu’à présent et donne des nuances aux conclusions déjà formulées à ce sujet. On a démontré, il y a quelques années, avec des arguments solides, que les scènes de violence dans les chroniques de l’époque d’Étienne le Grand ont été calquées sur l’Ancien Testament et les écrits apocalyptiques, que le prince de Moldavie semble avoir suivi, en sa qualité assumée de «dernier empereur», vainqueur des infidèles et pacificateur avant la fin du monde. Certaines actions violentes d’Étienne le Grand sont similaires à celles attribuées à Vlad l’Empaleur, prince de Valachie, dans des histoires qui ont connu un réel succès d’un bout à l’autre de l’Europe, au-delà des frontières politiques ou religieuses. Ce qui ne nous permet pas cependant de supposer que les deux princes étaient animés des mêmes goûts morbides. En réalité, nous avons affaire à la même gamme de gestes de pouvoir, spécifiques aux souverains médiévaux qui, suivant le modèle du princeps justus, avaient le droit – même le devoir – d’utiliser la violence pour inspirer la peur. La difficulté consiste à remarquer la différence entre la «violence légitime de l’État» et la «violence privée illégitime» (Hans-Jacob Orning). Cette dernière était associée à la cruauté, considérée comme un vice pour un monarque chrétien. Avec la cupidité et la sévérité excessive, elle caractérisait le règne des tyrans. Le recours à la violence légitime par Étienne le Grand était une composante de son exercice du pouvoir, nécessaire pour créer et maintenir l’insécurité et la peur, afin que les opposants, de l’intérieur ou de l’extérieur, n’osent rien faire d’autre que se soumettre. Des décisions surprenantes, des menaces, des attaques inattendues, des châtiments sanglants faisaient partie du mécanisme complexe de gouvernance des souverains de droit divin, autocrates, dont l’autorité reposait non seulement sur le soutien volontaire, mais aussi sur la peur.
Les auteurs reprennent l’analyse d’une source narrative du XVe siècle, Cronica breviter scripta Stephani Dei gratia voivoda terrarum Moldannens(ium) necnon Valachyens(ium), connue dans l’historiographie sous le nom de Chronique moldave-allemande. Découverte et publiée par le savant polonais Olgierd Górka (1887–1955), cette chronique a retenu l’attention des spécialistes qui lui ont consacré des articles et des études spéciales. On sait aujourd’hui que la traduction allemande est datée le 28 avril 1502, que l’auteur de la copie est l’humaniste allemand Hartmann Schedel, médecin à Nuremberg et auteur de l’ouvrage Liber chronicarum, publié en 1493, que, dans la source slave qui a servi à la traduction, la description des événements doit avoir été interrompue en 1486 et que la dernière partie de la copie allemande, couvrant la période 1488–1499, a été ajoutée plus tard.
La présente recherche se propose d’ajouter à ces conclusions quelques autres nouvelles observations. La Cronica breviter scripta est la traduction d’une version de la chronique slave de la Cour moldave, parvenue dans le monde allemand avant 1497–1500. Ce prototype, prêt à être envoyé en Occident, fut achevé entre l’été 1496 et l’automne 1497. Le témoin de tous les événements décrits et le participant à toutes les campagnes militaires, le seul qui aurait pu fournir des informations détaillées à leur sujet ne pouvait être qu’Étienne le Grand lui-même. Il semble que, pour tracer le portrait du prince, l’auteur de cette source soit parti non pas des événements historiques, mais d’un portrait-modèle en vertu duquel il a choisi les moments ou les circonstances les plus évocatrices. Mais c’est là une technique utilisée dans les textes narratifs de propagande, dans laquelle la sélection des faits a le but de créer l’image d’un État ou d’un souverain dans un contexte approprié et sous un jour favorable. Par conséquent, la source originale de la Cronica breviter scripta n’est pas seulement un texte narratif contemporain du règne d’Étienne le Grand, mais l’histoire officielle de 1457–1486, présentée du point de vue de son héros principal et dans le but évident d’offrir au monde extérieur de la Moldavie l’image de son souverain, construite selon le modèle du prince idéal.
L’étude analyse l’apparition d’une comète (nommée plus tard de Halley) en 1531, dans le contexte du conflit militaire entre la Moldavie et la Pologne. La traversée du ciel par une comète pendant l’été de cette année a été enregistrée par de nombreux témoignages de l’époque, tant en Europe qu’en Asie, mais dans les sources de Valachie et de Moldavie, contemporaines de l’événement, elle n’a laissé aucune trace. Les chroniqueurs polonais placent l’apparition de l’astre à des dates différentes, selon les événements militaires déployés sur le terrain : soit lorsque les troupes polonaises ont traversé le Dniestr (le 1er août), soit lors de la bataille d’Obertyn (le 22 août). D’après Stanisław Gorski, la comète est apparue le 12 août, le phénomène faisant espérer les combattants que l’étoile leur prédise, du ciel, une brillante victoire, car elle ressemblait aux armoiries de leur commandant, l’hetman Jan Tarnowski. Le chroniqueur saxon Hieronymus Ostermayer ajoute le détail que la comète a été visible pendant cinq jours. En tenant compte de tous les témoignages disponibles, l’auteur conclut que le phénomène céleste aurait été visible approximativement entre le 12 et le 16 août ; durant cet intervalle, aucun événement important ne s’était produit au sol. Cependant, les auteurs polonais l’ont transformé en signe de victoire et ont placé le moment de son apparition soit au début du conflit moldo-polonais, soit à sa fin, tel que le narrateur l’a jugé plus approprié ou suggestif. L’association de l’étoile brillante et lumineuse dans le ciel avec l’étoile d’or sur le champ d’azur des armoiries de Jan Tarnowski (le herb Leliwa) est la dernière et la plus convaincante preuve que le phénomène astronomique de l’été 1531 ait été utilisé comme moyen de propagande politique en faveur des Polonais. Voilà pourquoi le chroniqueur moldave Macaire n’a pas ressenti le besoin d’invoquer son apparition dans la description de la campagne terminée d’une manière désastreuse pour son prince, Pierre Rareş.
En 2004, l’auteur a cosigné, avec M. Ştefan S. Gorovei, une étude consacrée aux emblèmes impériaux de la princesse Marie Assanine Paléologuine, épouse d’Étienne le Grand, prince de Moldavie (1457–1504). Après presque deux décennies, le sujet est repris, cette fois-ci du point de vue historiographique.
L’étude ci-présente est composée de deux volets. Dans le premier, on passe en revue les titres qui, en 2004, ont été perdus de vue ou qui n’ont pas été retrouvés dans les bibliothèques fréquentées à l’époque. Les textes, résumés dans l’ordre chronologique de leur publication, ne changent en rien la démonstration et les conclusions initiales, mais, par contre, les confirment et les renforcent: le monogramme des Paléologues a été un signe caractéristique pour les membres de cette famille et seulement pour eux, un signe qui soulignait leur appartenance généalogique à la dynastie des derniers empereurs byzantins. L’association du monogramme à l’aigle bicéphale, «les bâtons parallèles», «le losange ouvert» ou le swastika (la croix gammée) fait de chacun d’eux des symboles du pouvoir impérial.
Le deuxième volet est consacré à l’analyse de la nouvelle bibliographie consacrée – directement ou tangentiellement – aux emblèmes des Paléologues. Il s’agit de conférences et d’articles rédigés après 2004 par Paul Canart, Bojan Popović, Robert Ousterhout, Jasmina S. Ćirić, Ştefan S. Gorovei, R. P. Gabriel Herea, Paschalis Androudis, Pagona Papadopoulou et Cécile Morrisson ou le moine Alexie Cojocaru. À quelques exceptions près, les insignes de famille et de pouvoir des Paléologues ont été étudiés seulement dans leurs représentations byzantines et éventuellement dans leurs échos ou répliques du monde sud-slave. Mais, omettre de la discussion les emblèmes brodés sur la couverture de tombeau de la princesse Marie Assanine Paléologuine et ceux qui proviennent de la principauté d’origine de cette princesse, Theodoro (Mangop), appauvrit la sémiotique politique de l’Empire byzantin et empêche une compréhension nuancée de la circulation et du transfert de symboles – porteurs, quel que soit le lieu, des mêmes messages idéologiques. Il faut du temps pour que les résultats d’une recherche soient connus et assimilés dans le circuit scientifique, mais allonger excessivement cet intervalle peut être un signe d’ignorance ou d’arrogance. La méconnaissance des résultats obtenus par d’autres chercheurs dans un domaine d’intérêt commun a attiré la formulation, à plusieurs reprises, d’observations déjà faites et de questions qui avaient trouvé entre-temps leur réponse. Lire et publier en plusieurs endroits le même texte, au fil des années, sans mettre à jour l’appareil critique, est une pratique inacceptable dans le monde académique. Malheureusement, l’autorité scientifique de certains auteurs repose, assez souvent, sur de tels procédés, et sur cette autorité repose leur crédibilité. Ensuite, cette crédibilité devient un gage de compétence. Les emblèmes paléologues du pouvoir souverain – représentés sur
divers supports et dans une large aire géographique – auraient pu devenir l’un de ces objets d’étude qui prouvent la rigueur, la compétence et la bonne foi des spécialistes en la matière. Le bref bilan historiographique dressé ici montre pourtant qu’il n’en est pas du tout ainsi.
Les documents du premier siècle et demi de l’existence de la principauté moldave contiennent parfois des mentions de maisons ou de cours de certains propriétaires, dans des formules telles que: «où était la maison» et «où était la cour». La présente recherche tente de déchiffrer le sens de ces indications et de découvrir s’ils peuvent contribuer à la reconstitution
de certaines structures de résidence et de propriété d’une époque pour
laquelle les témoignages écrits sont très peu nombreux ou totalement
absents. L’analyse des sources met en lumière quelques observations
intéressantes. Dès le début, il faut préciser qu’il n’y a aucune raison de
considérer les termes maison (sl. domá) et cour (sl. dvorá) comme
synonymes. Les sources écrites et archéologiques prouvent que, pour
nos aïeux des XIVe et XVe siècles, cour signifiait un ensemble bâti sur
une hauteur naturelle (colline, butte, crête), généralement dans un lieu
à forte visibilité, clôturé et composé de la maison du propriétaire – une
structure en maçonnerie –, des dépendances et d’une église-nécropole.
Comme les sources font la distinction entre cour et maison, il faut
supposer que ce dernier terme désignait simplement une habitation,
soit en bois, soit en pierre et briques. La cour comprenait nécessairement une maison, mais une maison ne comprenait en aucun cas une cour. Par conséquent, le terme cour pourrait également être utilisé dans le sens étroit d’habitation – comme il apparaît dans certains cas dans les documents moldaves –, mais le mot maison ne pourrait pas définir l’ensemble du complexe résidentiel, avec tous ses bâtiments, y compris l’église. Les cours étaient situées soit dans des villages individualisés par leur nom, soit dans des villages anonymes, situées au bord de certaines rivières, soit dans une zone connue sous le nom de Champ de Dragoş (Câmpul lui Dragoş). Certains villages où se trouvaient des maisons ou des cours des boyards recevaient les noms de leurs propriétaires. Cartographier toutes les maisons et les cours documentées tout au long du XVe siècle permettrait d’avoir une idée plus concrète de l’emplacement de ces résidences et pourrait fournir des indices sur la valeur économique de ces points, en fonction de leur proximité à des routes et des cours d’eau, c’est-à-dire à des voies de communication de l’époque. C’est d’autant plus important que le rôle militaire des cours des boyards en Moldavie ne semble pas avoir été si significatif qu’on le pensait. Une carte pourrait faciliter la recherche et la localisation, par des moyens modernes d’identification, de sites qui méritent une enquête systématique. Il faudrait ensuite voir, par des recherches généalogiques et prosopographiques, qui étaient les propriétaires des maisons, qui des cours, et si une différence sociale ou économique peut être observée entre eux.
La chronique attribuée à Grégoire Ureche contient six paragraphes avec „enseignements” et „réprimandes”, qui brisent la suite chronologique des évènements. Leur contenu se concentre autour des gestes faits par un roi de Pologne ou par des princes et des boyards moldaves, autrement dit des personnes de la sphère du pouvoir, directement impliquées dans l’acte de gouvernement. Les termes „enseignement” et „réprimande” en roumain ancien couvraient les directions autour desquelles était composé un écrit du type Fürstenspiegel. De même que Les Enseignements de Neagoe Basarab, les fragments de réflexion philosophico-politique de la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode sont des conseils et des avertissements concernant le gouvernement du pays, qui remplissent une fonction formatrice, visant le bon accomplissement de la mission que Dieu avait confiée aux souverains.
Une chronique „depuis la fondation du pays” – comme la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode – était non seulement une collection d’informations portant sur des évènements passés mais surtout une source de légitimité et en même temps un écrit à fonction moralisatrice, destinée à éduquer ceux élus pour gouverner le pays et soutenir sur des fondements historiques leur idéologie politique. L’auteur croit que bénéficiaires des modèles et des anti-modèles de princes qui se trouvent dans la chronique, mais également des paragraphes d’„enseignements” et de „réprimandes” dût être le prince moldave Basile Lupu (dont les efforts de trouver une place dans la succession des anciens souverains et de créer une monarchie héréditaire sont bien connus) et ses successeurs.
L’étude comporte deux volets, puisqu’il s’agit de deux épisodes de la campagne militaire de Bogdan III (1504–1517) dans le royaume de Pologne en 1509. Le premier, décrit par des chroniqueurs moldaves des XVIIe et XVIIIe siècles, se rapporte à un geste du prince de Moldavie qui, au début du siège de la forteresse de Lwów, jeta sa lance vers la porte de la fortification. Comme l’ont démontré les historiens Ovidiu Cristea et, après lui, Katarzyna Niemczyk, le geste avait une valeur symbolique, étant compris comme une déclaration de guerre, comme un défi au combat ouvert. En faveur de cette interprétation, l’auteur de la présente étude fournit des exemples supplémentaires, tirés des écrits de Diodore de Sicile, Tite-Live, Dio Cassius et Ammien Marcellin, et réitère l’idée que jeter la lance dans le territoire ennemi est, plus que probablement, un topos, emprunté soit directement aux auteurs antiques, soit par l’intermédiaire de penseurs comme Hugo Grotius ou Samuel Rachelius, qui, concentrés sur les fondements juridiques des guerres, ont fait de nombreuses références à l’antiquité classique.
Le deuxième épisode, raconté à la fois par des chroniqueurs moldaves et polonais, a eu lieu dans la ville de Rohatyn, d’où Bogdan III a enlevé la grande cloche de l’église comme butin de guerre pour l’apporter à Suceava où se trouvait le siège métropolitain de sa principauté. Katarzyna Niemczyk estime que le pillage de la ville de Rohatyn, qui appartenait au domaine de la famille de Chodecz, ainsi que l’enlèvement de la cloche auraient été un acte de vengeance du prince de Moldavie contre le noble polonais Stanisław de Chodecz, qu’il considérait coupable de l’échec de son projet de mariage avec la sœur du roi Alexandre de Pologne, quelques années auparavant. Mais, comme l’auteur du texte ci-dessus l’a montré déjà en 2011, avec de nombreux exemples et analogies, la prise d’une cloche en captivité était, dans toute l’Europe médiévale et prémoderne, un geste de pouvoir, propre aux souverains et aux seigneurs. Les sources du temps, tant celles de l’Europe de l’Est que celles de l’Occident, qui mentionnent de tels événements, sont catégoriques à cet égard. En conclusion, l’enlèvement de la cloche de Rohatyn ne peut être interprété uniquement en termes de vengeance personnelle, mais aussi comme une forme de punition, d’humiliation et de désacralisation, qui touchait un symbole de l’identité collective, de la richesse et du prestige des vaincus.
(Résumé)
Les chroniques moldaves du XVIIe siècle – Letopiseţul Ţării Moldovei până la Aron vodă (La Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode), attribué à Grégoire Ureche, ainsi que celle d’après Aron voïvode, œuvre de Miron Costin – contiennent la description des caractères, des défauts et des qualités de certains princes de Moldavie et, exceptionnellement, le portrait d’un prince de Valachie. Pour les personnages caractérisés, les chroniqueurs ont retenu soit exclusivement des traits positifs, soit négatifs, soit les deux. La lecture en parallèle des chroniques et des Enseignements du prince de Valachie Neagoe Basarab à son fils Théodose – la première œuvre parénétique de la littérature roumaine, rédigée un siècle auparavant – prouve qu’entre les portraits princiers des chroniques et les recommandations pour un bon gouvernement de l’œuvre parénétique il y a bien de similitudes. La piété, les qualités militaires, le désir de paix, les aptitudes d’organisateur, la capacité de rendre justice de manière équitable et les vertus personnelles sont des traits communs tant au portrait idéal promu dans les Enseignements qu’aux portraits individuels des chroniques. Les exemples cités par l’auteur de la présente étude il en résulte que les chroniqueurs moldaves aient utilisés un modèle de bon prince (princeps bonus), construit autour de quelques vertus communes pour toute l’Europe chrétienne: pietas, pax, ordo et iustitia. À ces quatre vertus cardinales s’ajoutaient, en fonction de la personnalité du monarque et des circonstances historiques – la force, le courage, la fermeté, la clémence, la miséricorde, la tempérance et la sagesse.
La chronique attribuée à Grégoire Ureche contient six paragraphes avec „enseignements” et „réprimandes”, qui brisent la suite chronologique des évènements. Leur contenu se concentre autour des gestes faits par un roi de Pologne ou par des princes et des boyards moldaves, autrement dit des personnes de la sphère du pouvoir, directement impliquées dans l’acte de gouvernement. Les termes „enseignement” et „réprimande” en roumain ancien couvraient les directions autour desquelles était composé un écrit du type Fürstenspiegel. De même que Les Enseignements de Neagoe Basarab, les fragments de réflexion philosophico-politique de la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode sont des conseils et des avertissements concernant le gouvernement du pays, qui remplissent une fonction formatrice, visant le bon accomplissement de la mission que Dieu avait confiée aux souverains.
Une chronique „depuis la fondation du pays” – comme la Chronique de Moldavie jusqu’à Aron voïvode – était non seulement une collection d’informations portant sur des évènements passés mais surtout une source de légitimité et en même temps un écrit à fonction moralisatrice, destinée à éduquer ceux élus pour gouverner le pays et soutenir sur des fondements historiques leur idéologie politique. L’auteur croit que bénéficiaires des modèles et des anti-modèles de princes qui se trouvent dans la chronique, mais également des paragraphes d’„enseignements” et de „réprimandes” dût être le prince moldave Basile Lupu (dont les efforts de trouver une place dans la succession des anciens souverains et de créer une monarchie héréditaire sont bien connus) et ses successeurs.
Le but de cette étude est de souligner la nécessité d’un changement de méthodologie dans les enquêtes prosopographiques concernant la Moldavie du XIVe siècle. Depuis la fondation de l’État médiéval moldave, au milieu de ce siècle, jusqu’en 1400, ont été conservés environ 20 documents sortis de la chancellerie princière. Ils contiennent les noms de moins de 70 boyards – trop peu pour nous donner une idée de l’élite sociale du nouvel État, de sa composition et de sa dynamique. En appliquant une grille de lecture différente aux documents et en utilisant des méthodes développées dans les recherches généalogiques, prosopographiques et onomastiques, l’auteur parvient finalement à dresser une liste de 108 noms des plus anciens boyards moldaves. Certains ne sont connus que de nom. Pour d’autres, on a identifié les propriétés, les résidences ou la postérité, ce qui révélait souvent des structures d’habitation et de parenté qui précédaient la naissance de l’État et qui subsistaient même après son organisation. Des recherches plus poussées et l’utilisation d’autres catégories de sources (telles que les noms de villages ou les obituaires) pourraient contribuer à l’enrichissement de la liste des noms et à une reconstitution plus précise du tissu social à l’aube de la vie d’État en Moldavie.
Depuis le XVIe siècle, les sources historiques moldaves enregistrent une marchandise au nom bizarre, généralement importée de Moscou et qui était régulièrement envoyée à la Sublime Porte en tant que présents (peşkeş): les «dents de poisson». En essayant d’identifier cette marchandise inhabituelle, les chercheurs ont proposé, jusqu’à présent, plusieurs hypothèses: ivoire, carapaces de tortues, crocs de morse ou dent d’espadon. D’autre part, les termes utilisés pour définir le produit dans les sources russes, mais aussi orientales et chinoises, pourraient désigner à la fois l’ivoire de morse et de narval. À l’époque, la dent de narval était confondue avec la «corne de licorne» – une sorte de panacée universelle, qui avait la capacité de détecter et de neutraliser tout poison, de purifier l’eau, de guérir de nombreuses maladies et d’avoir des propriétés aphrodisiaques. La «corne de licorne» était aussi une marque de pouvoir et un objet de prestige, que tous les souverains devaient posséder. L’auteur de cet article rassemble et analyse toutes les pistes pour voir laquelle des hypothèses est la plus plausible. Enfin, à l’aide des informations offertes par plusieurs catégories de sources, mais aussi par les analogies, on peut conclure que les «dents de poisson» doivent être identifiées seulement aux crocs de morse.
Les relations commerciales de la Moldavie forment un des sujets qui ont constamment retenu l’intérêt des médiévistes roumains. Des documents publiés depuis la seconde moitié du XIXe siècle ont permis d’éclaircir un certain nombre d’aspects: les réseaux de transport, la naissance et le développement des foires commerciales, le type de marchandises importées et exportées, le volume des transactions, les monnaies en circulation, les institutions, ethnies, familles et individus impliqués dans le commerce, etc. Les études pionnières de N. Iorga, I. Nistor, G. Zane, Radu Manolescu ou Alexandru I. Gonţa trouvent leur continuation aujourd’hui, avec de beaux résultats, dans des monographies, des études ou des volumes collectifs. Malheureusement, trop peu des produits coûteux qui sont arrivés en Moldavie sous forme de marchandises ou de présents ont résisté à l’épreuve du temps. Combiner des informations écrites avec des sources archéologiques et trouver des analogies avec des pièces similaires conservées dans des collections et des musées d’autres pays peut être une méthode pour reconstituer l’apparence, la qualité et la destination des objets qui, au-delà de leur utilisation pratique, avaient également le rôle de marques d’identité: ils signalaient la supériorité sociale de leur propriétaire. La présente étude essaie de les identifier et de saisir leur signification, en recherchant quelques étoffes (drap et brocart panni d’oro), certains vêtements et tissus (çatma et velours benek) reçus en cadeau de la Porte Ottomane, des gants, des carrosses et des montres. Les présents reçus par les princes et les boyards moldaves du XVIe siècle, ainsi que les biens achetés au profit de la Cour, ne permettent pas de parler d’une vie aristocratique comme celle de l’Europe occidentale. Cependant, les étoffes précieuses, les vêtements moins communs, les moyens de transport décorés, les instruments techniques extravagants, la nourriture et les boissons d’un certain raffinement, tout dessine l’image d’une Cour de l’Est, où princes et boyards, prenant des modèles à la fois occidentaux et orientaux, s’efforçaient, avec leurs propres ressources et moyens, d’être contemporains du monde dans lequel ils vivaient.
L’auteur se propose d’examiner un tableau conservé dans la collection d’art du château de Konopištĕ (République tchèque), ayant appartenu autrefois à l’archiduc François-Ferdinand († 1914). Il s’agit d’un portrait à l’huile, non signé, d’un garçon de 11 à 12 ans, monté sur un cheval andalou et vêtu d’un magnifique costume de cérémonie d’inspiration polonaise, avec une petite épée sur la hanche. En 1913, Jerzy Mycielski a écrit, sans présenter ses arguments, que le portrait dépeint Jean-Casimir, fils du roi Sigismond III Vasa de Pologne (1587–1632) et de sa seconde épouse, Constance d’Autriche. Plus tard, on a remarqué que certains détails du costume du garçon ne correspondaient pas aux goûts vestimentaires de la Pologne des premières décennies du XVIIe siècle. Par conséquent, en 1986, Mieczysław Morka a émis l’hypothèse que le personnage du tableau pourrait être Alexandre Movilă (Mogila), le fils de Jérémie Movilă, prince de Moldavie (1595–1606), dont les liens avec la Pologne sont bien connus. Selon cet auteur, le tableau aurait été peint en 1615, lorsqu’Alexandre lui-même est devenu prince de Moldavie. Mais l’âge du prince moldave ne supporte pas cette attribution: né en 1601, Alexandre avait 14 ans en 1615, bien plus que l’enfant en costume polonais. En 1988, Jan K. Ostrowski et Jerzy T. Petrus ont montré que, dans les premières décennies du XVIIe siècle, la mode polonaise était répandue aussi à la cour florentine du grand-duc de Toscane, Côme II de Médicis (1609–1621), beau-frère du roi Sigismond III Vasa. Les deux chercheurs ont proposé d’identifier l’enfant du tableau avec l’un des fils de Côme – Léopold ou Ferdinand, et le peintre, avec Justus Sustermans, l’artiste de la cour des Médicis. Ils ont également daté le portrait vers 1625–1630. Enfin, dans une étude publiée en 1998, Magdalena Piwocka a démontré, d’une manière convaincante et avec de nombreux arguments, que le modèle du portrait équestre était Ferdinand II de Médicis, grand-duc de Toscane (1621–1670), que le peintre est vraiment le portraitiste Justus Sustermans d’Anvers et que le tableau a été réalisé en 1621–1622. Cependant, en 2017, lorsque la Galerie des Offices de Florence a organisé une exposition consacrée à «Léopold de Médicis, prince des collectionneurs», la peinture de Konopištĕ a été utilisée pour illustrer l’affiche et la couverture du catalogue, les commissaires de l’exposition voyant dans le petit cavalier le futur cardinal Léopold, peint vers 1624–1625 par Justus Sustermans. Malgré cette attribution, d’autres arguments (la robe grise du cheval, la représentation équestre du personnage, le caractère officiel du portrait, son message politique et idéologique) soutiennent la démonstration de Magdalena Piwocka. Le seul enfant de Côme II qui aurait pu être peint dans un tableau comme celui de Konopištĕ était Ferdinand II de Médicis, devenu grand-duc de Toscane en 1621, à l’âge de 11 ans.
O samă de cuvinte (Récits choisis) est un recueil de brefs récits écrits par le maréchal (dvornik) Ion Neculce, chroniqueur moldave († 1745). Chronologiquement, leur action est placée entre le moment de la fondation de l’État moldave et le règne de Ştefăniţă Lupu (1659–1661). Il semble que ces histoires aient été élaborées, comme la chronique du même auteur, en plusieurs étapes, dans la première moitié du XVIIIe siècle. Les recherches menées sur ces écrits ont prouvé qu’ils ne sont pas de simples fantaisies littéraires, mais des légendes tissues autour des faits historiques. Certaines d’entre elles sont inspirées par des sources écrites (chroniques plus anciennes), mais la plupart ont été racontées à l’auteur par des personnes connues tout au long de sa vie, par des membres de sa propre famille et par des représentants d’autres familles nobles moldaves (Cantacuzino, Purice, Tăutu etc.) et par des moines des monastères Putna, Slatina et peut-être Probota. Cette étude essaie de surprendre – en appliquant les principes théoriques et les méthodes utilisées dans la série de volumes coordonnés par Pierre Nora – la manière dont la mémoire (individuelle ou collective) est incarnée dans les histoires de Ion Neculce et d’identifier les dimensions (historiographique, littéraire, ethnographique etc.) qui les structurent. L’objectif est de déterminer si O samă de cuvinte (Récits choisis) peuvent être considérés comme un lieu de mémoire pour les Roumains.
In the 16th and 17th centuries, the Romanian Principalities lacked treatises of political theory or compendia of comments on works of classical philosophy with references to practices of political governance. For this reason, people’s perceptions of political contention and its outcomes can only be reconstructed starting from the odd allusion and comment scattered in the period’s written sources.
In the Romanian Principalities the deposition of princes through violence was not routine practice, but the extreme solution to a political deadlock. Recourse to this form of violence can be explained by the lack of a clear, immutable system of succession. At the same time, the small number of princely assassinations must be connected to a conception of the monarch’s body as having a mystical dimension, as being sacred, immortal and intangible. If we attempt to construct a typology of the protesters, the first thing we notice is that the initiators and leaders of the protest movements were always members of the noble class (boyars). On the one hand, as members of the country’s political apparatus, the boyars had all the inside information and could identify correctly the right moment for an intervention. Their uprisings invariably took place in politically unstable moments and as such they are reliable indicators of major crises. On the other hand, as wealthy property-owners, only the boyars had the resources needed for sending envoys, for travelling inside and outside the country’s borders, and for assembling and maintaining armies. The pressure groups were not formed randomly, but more often than not relied on alliances founded on kinship, intermarriage or ritual. Such a group needed a leader – an individual who took the initiative and had the means of attracting like-minded malcontents. Participation in political contention was a major risk, which the participants acknowledged and accepted. Therefore, the links between leader and associates had to rely on discretion, trust and mutual loyalty (in some cases sealed by a binding oath).
Some expressions of violence were considered legitimate and, as such, were tolerated by society; however, excessive violence – i.e. non-legitimate violence – was denounced and penalized. Violence against the ruling prince, irrespective of the causes, was not condoned and, when it happened, had to be justified and defended in the eyes of contemporaries and posterity alike through a discourse which presented the slain monarch as having departed from the model of the ideal sovereign and as having failed to fulfil his duties to the subjects. A prince’s assassination was a way of eliminating an unjust tyrant, thereby also removing the principles, norms and values he promoted. Even though most sources do not indicate the deeper causes of contention, it is likely that rather than being random acts of insubordination, such movements were the outcome of real, serious and deep-seated grievances, with solid ideological foundations.
La recherche du point de vue comparatif des épisodes cruels et sanglants du règne d’Étienne le Grand, prince de Moldavie (1457–1504), met en lumière des aspects non relevés jusqu’à présent et donne des nuances aux conclusions déjà formulées à ce sujet. On a démontré, il y a quelques années, avec des arguments solides, que les scènes de violence dans les chroniques de l’époque d’Étienne le Grand ont été calquées sur l’Ancien Testament et les écrits apocalyptiques, que le prince de Moldavie semble avoir suivi, en sa qualité assumée de «dernier empereur», vainqueur des infidèles et pacificateur avant la fin du monde. Certaines actions violentes d’Étienne le Grand sont similaires à celles attribuées à Vlad l’Empaleur, prince de Valachie, dans des histoires qui ont connu un réel succès d’un bout à l’autre de l’Europe, au-delà des frontières politiques ou religieuses. Ce qui ne nous permet pas cependant de supposer que les deux princes étaient animés des mêmes goûts morbides. En réalité, nous avons affaire à la même gamme de gestes de pouvoir, spécifiques aux souverains médiévaux qui, suivant le modèle du princeps justus, avaient le droit – même le devoir – d’utiliser la violence pour inspirer la peur. La difficulté consiste à remarquer la différence entre la «violence légitime de l’État» et la «violence privée illégitime» (Hans-Jacob Orning). Cette dernière était associée à la cruauté, considérée comme un vice pour un monarque chrétien. Avec la cupidité et la sévérité excessive, elle caractérisait le règne des tyrans. Le recours à la violence légitime par Étienne le Grand était une composante de son exercice du pouvoir, nécessaire pour créer et maintenir l’insécurité et la peur, afin que les opposants, de l’intérieur ou de l’extérieur, n’osent rien faire d’autre que se soumettre. Des décisions surprenantes, des menaces, des attaques inattendues, des châtiments sanglants faisaient partie du mécanisme complexe de gouvernance des souverains de droit divin, autocrates, dont l’autorité reposait non seulement sur le soutien volontaire, mais aussi sur la peur.
Les auteurs reprennent l’analyse d’une source narrative du XVe siècle, Cronica breviter scripta Stephani Dei gratia voivoda terrarum Moldannens(ium) necnon Valachyens(ium), connue dans l’historiographie sous le nom de Chronique moldave-allemande. Découverte et publiée par le savant polonais Olgierd Górka (1887–1955), cette chronique a retenu l’attention des spécialistes qui lui ont consacré des articles et des études spéciales. On sait aujourd’hui que la traduction allemande est datée le 28 avril 1502, que l’auteur de la copie est l’humaniste allemand Hartmann Schedel, médecin à Nuremberg et auteur de l’ouvrage Liber chronicarum, publié en 1493, que, dans la source slave qui a servi à la traduction, la description des événements doit avoir été interrompue en 1486 et que la dernière partie de la copie allemande, couvrant la période 1488–1499, a été ajoutée plus tard.
La présente recherche se propose d’ajouter à ces conclusions quelques autres nouvelles observations. La Cronica breviter scripta est la traduction d’une version de la chronique slave de la Cour moldave, parvenue dans le monde allemand avant 1497–1500. Ce prototype, prêt à être envoyé en Occident, fut achevé entre l’été 1496 et l’automne 1497. Le témoin de tous les événements décrits et le participant à toutes les campagnes militaires, le seul qui aurait pu fournir des informations détaillées à leur sujet ne pouvait être qu’Étienne le Grand lui-même. Il semble que, pour tracer le portrait du prince, l’auteur de cette source soit parti non pas des événements historiques, mais d’un portrait-modèle en vertu duquel il a choisi les moments ou les circonstances les plus évocatrices. Mais c’est là une technique utilisée dans les textes narratifs de propagande, dans laquelle la sélection des faits a le but de créer l’image d’un État ou d’un souverain dans un contexte approprié et sous un jour favorable. Par conséquent, la source originale de la Cronica breviter scripta n’est pas seulement un texte narratif contemporain du règne d’Étienne le Grand, mais l’histoire officielle de 1457–1486, présentée du point de vue de son héros principal et dans le but évident d’offrir au monde extérieur de la Moldavie l’image de son souverain, construite selon le modèle du prince idéal.
This book was born out of the authors’ wish to explore one particular type of social experience in the Romanian Principalities and Transylvania of the old regime: women’s experience. Apart from capturing often fascinating biographical details about better- or lesser-known individual female figures, the life narratives included in this volume are also meant to be alternative pathways into the understanding of old-regime Romania via the roles played by women. Whether one looks at the domestic space or at aspects of economic, political, religious and cultural life, women are found to be active either as protagonists or in minor, anonymous roles from the early modern period to the nineteenth century and beyond. Despite the relative scarcity of documentary sources in the three provinces and the comparative absence of female literary characters or of first-person female voices, occasionally a woman’s profile will stand out. Using life narratives and collective portraits as formats, we have put together a ‘bouquet’ of women’s biographies, showcased against the backdrop of sociopolitical and cultural developments in the two Romanian provinces and Transylvania. The ‘bouquet’
is a reference to the title of this volume, A Garden of Roses, inspired by an anthology of writings by the visionary Saint Marguerite-Maria Alacoque (1647–1690) (Jó illatú Rózsás Kert, A Rose Garden Most Fragrant). It was translated into Hungarian by the Countess Sigray Erzsébet Róza in 1703 in Vienna and published in Bratislava in 1712 with the support of the Transylvanian Count Samuel Kálnoky and his daughter Hedvig. It is not so much the delicate beauty of the roses that lies behind the choice of title, but the metaphorical suggestions of the garden as a liminal area between the intimacy of the home and the openness of the public space.
The connotations we can associate with the idea of color are multiple and come from different disciplinary areas. On a strictly biological level, color derives from the possibility of the human eye to perceive one or more frequencies (wavelengths) of light. For the historian, as for the sociologist or anthropologist, the color is, first of all, defined as a fact
of society, capable of highlighting matters of a symbolic, ideological, socio-political, and cultural nature. Color is a language in itself, assuming differences according to the age, the investigated cultural space and the social category that uses it for a particular purpose at a given time. The relationship between body and color reveals a whole worldview, as color perception is profoundly influenced by how we decipher our own epidermis. The choice of colors also depends on the way in which the different societies have modulated them through language. Terminologies are often poor and raise problems when the need to translate a text into another language arises. Under these methodological principles, the Faculty of History of the “Alexandru Ioan Cuza” University of Iaşi and the Faculty of Letters of the University of Bucharest organized, on 25 of November 2017, in Iaşi, the interdisciplinary Conference The history of colors – chromophile and chromophobic intersections. The program included 16 papers, of which 14 were read, and in this issue of the “Scientific Annals of the Alexandru Ioan Cuza University of Iasi” (new series) 12 are published.
Surrounded more and more by machinery and lifeless objects, and living in sophisticated concrete, metal, and glass structures, the people nowadays seem
to start remembering the life in the natural environment and their fellow beings
of olden times. The growth of the pets’ number, usage of animals for therapeutic
purposes, increase of the publications dedicated to them, feature films,
documentaries, television and radio programmes, cartoons, novels, posters,
figurines, toys, and knickknacks confirm the fact that the affective space of the
animals becomes larger and larger and more spacious. Threatened to lose our
own identity we try to find it again with the help and through animals, real or
imaginary.
In today’s Romanian research on the Middle Ages the inter-disciplinary
approach is practised occasionally and rather rarely. The relationship of
geography, theology, philosophy, law, economical sciences, ethnology, and
history of literature, art, architecture, music or medicine, with biology,
chemistry, and physics are either non-existent or rather weak. The way
reconstruction of the past is looked upon today urges not to limit the perspective,
but to enlarge it. Looking only from one direction, a bi-dimensional image is
seen; the relief, depth, proportions are given only by the images taken from
different angles and by the comparisons to the neighbouring realities. The model
comes from the French historiography, more exactly from the series of books
published in the collection of “Cahiers du Léopard d’Or”, in which a subject of
common interest is treated with various conceptual methods, regulations and
tools, by experts with various training, focuses and sensitivities, this common
effort always generating a complex and unitary image in its diversity, much
closer to the way the reflected reality must have looked like. These findings and
this model generated the idea to organise in Iaşi city (in 2009 and 2010) two
inter-disciplinary colloquies dedicated to the place, meaning and importance of
animals in the life of the people of olden times in the Romanian territory. The
present book is the expression of this new type of tackling the Romanian past.